Agressions sexuelles: la parole se libère dans le monde sur Twitter

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#MoiAussi, #balancetonporc, #quellavoltache (cette fois où)… La parole se libère dans le monde entier à coups de mots-dièse sur Twitter pour dénoncer les agressions sexuelles. L’actrice américaine Alyssa Milano a posté samedi un message incitant les femmes victimes de harcèlement sexuel à témoigner sur Twitter en utilisant le mot-dièse «#MeToo» (#MoiAussi) dans le contexte de l’affaire Harvey Weinstein. Le célèbre producteur est accusé de viol, d’agression ou de harcèlement sexuel par de nombreuses comédiennes qui ont brisé le silence sur un comportement qui dure depuis des années. «Si vous avez été harcelée ou agressée sexuellement, écrivez «moi aussi» dans votre réponse à ce Tweet», a lancé Alyssa Milano depuis son compte @Alyssa_Milano. L’initiative a rencontré un fort écho mondial auprès de femmes, anonymes ou non, qui semblent évoquer pour la 1ère fois leur expérience en public. En Grande-Bretagne, le mot-dièse a notamment été utilisé par la député travailliste Stella Creasy. «J’ai été harcelée comme des millions de femmes et de filles dans le monde. La honte est sur les agresseurs, pas sur moi», a-t-elle écrit dimanche. Traduit en arabe, il est utilisé en Tunisie pour décrire les incidents subies par les femmes au travail ou dans l’espace public, ou pour dénoncer une «culture du viol» banalisée. En Egypte, les femmes partagent leurs expériences de harcèlement sexuel, un fléau dans le plus grand pays du monde arabe. Selon l’ONU, 99,3% des Egyptiennes affirmaient en 2013 avoir été victime d’au moins une forme de harcèlement. En France, un appel semblable à dénoncer le harcèlement sexuel au travail est lui aussi devenu viral ces derniers jours sur Twitter. Sous le mot-clef #balancetonporc, la journaliste Sandra Muller invite à raconter, «en donnant le nom et les détails, un harceleur sexuel que tu as connu dans ton boulot». Beaucoup de femmes racontent les attouchements dans les transports, les injures. L’actrice et réalisatrice italienne Asia Argento, qui accuse M. Weinstein de l’avoir violé en 1997, a repris dimanche soir le mot-dièse #balancetonporc, en lançant sa version anglaise: #denounceallpigs. Elle a aussi utilisé le mot-dièse en italien #quellavoltache pour accuser un grand réalisateur d’Hollywood de l’avoir drogué pour ensuite abuser d’elle alors qu’elle avait 26 ans et «un réalisateur/acteur italien» d’avoir «sorti son pénis devant moi quand j’avais 16 ans». Lancé par la journaliste italienne Julia Blasi, #quellavoltache accompagne une série de récits, pratiquement jamais sans aucun nom, dénonçant des mots glaçants, des gestes déplacés, des agressions, des viols. Le mouvement lancé par Alyssa Milano n’est pas le 1er. La mannequin new-yorkaise Cameron Russell, 30 ans, a invité la semaine dernière ses homologues à partager leurs expériences d’agressions sexuelles sous le mot-dièse #MyJobShouldNotIncludeAbuse («mon métier ne devrait pas inclure d’abus»). Sa page Instagram a déjà récolté plus de 800 témoignages. En octobre 2016, le mot-clé #NotOkay avait été lancé après la diffusion d’une vidéo de 2005 dans laquelle Donald Trump, alors candidat républicain à la Maison Blanche, est enregistré parlant en termes grossiers des femmes qu’il convoite. La même année, l’Ukrainienne Anastasia Melnytchenko lance #Jen’aipaspeurdeparler en ukrainien et en russe. La militante pour les droits de la femme a inspiré plusieurs centaines de femmes russes, ukrainiennes, mais aussi arméniennes ou azerbaidjanaises, qui ont évoqué des traumatismes aggravés par le tabou qui règne dans leurs sociétés face aux victimes de violences sexuelles. En France, le gouvernement veut présenter l’an prochain au Parlement un projet de loi «contre les violences sexistes et sexuelles», et notamment harcèlement de rue. Le président Emmanuel Macron a promis dimanche une «procédure de verbalisation plus simple» des actes de harcèlement «pour qu’il y ait une réponse immédiate».