BeIn Sports, dotée de gros moyens, affiche de grandes ambitions

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Lancée en juin 2012, la chaîne sportive BeIn Sports (ex-Al-Jazira Sport), filiale d’Al-Jazira financée par l’Emirat du Qatar, s’est déjà offerte une longue liste de droits sportifs et a séduit par des tarifs très bas (11 euros par mois) plus de 1,7 million d’abonnés en France. 

Pièce maîtresse de la stratégie du Qatar dans le sport, après le rachat du Paris SG, BeIn Sports est dotée de gros moyens et affiche de grandes ambitions. Al-Jazira a choisi la France comme porte d’entrée prioritaire de BeIn Sports sur le marché européen de la télévision sportive. Mais le Qatar a déjà lancé la chaîne dans plusieurs autres pays: aux Etats-Unis en août 2012, avec deux chaînes (en espagnol et en anglais), au Canada, en Indonésie et à Hong Kong, principalement. En France, BeIn Sports est diffusée sur câble, ADSL et satellite. Fort de 300 collaborateurs, en partie recrutés chez Canal+, le bouquet regroupe les chaînes BeIn Sports 1 et BeIn Sports 2, ainsi qu’un multiplex qui permet de couvrir des matches en simultané. Le réseau est dirigé par Florent Houzot, ex-directeur d’Infosport sur Canal+, qui a succédé en janvier 2013 à Charles Biétry, ex-directeur des sports de Canal+ et de France TV. 

Outre une partie des droits des matches de Ligue 1 pour 2012-2016 et l’intégralité des matches du Mondial-2014 de football, dont 36 en exclusivitésur 64, la chaîne a raflé en quelques mois de nombreux autres droits sportifs : l’Euro-2012 et l’Euro-2016 (qui sont aussi présents sur les chaînes en clair), le Mondial de handball, payé au prix fort, de grands championnats européens (Bundesliga 2012-2015, Liga 2012-2015), la Ligue des champions pour 2012-2015, et en tennis Wimbledon de 2014 à 2018 et le Masters, diffusés jusqu’ici par Canal+. La chaîne qatarie a également décroché les droits de sept des neuf tournois Masters 1000 de l’ATP (Monte-Carlo et Paris-Bercy exceptés), ceux des ATP 500 et une partie des ATP 250. 

Canal+ l’accuse de pratiquer une concurrence déloyale par des prix trop bas par rapport au coût de revient de sa grille, qui serait de 300 à 400 millions d’euros par an selon les analystes, pour des recettes de seulement 140 millions. Elle a déposé plainte en lui réclamant près de 300 millions d’euros. A l’inverse, BeIn a fait savoir qu’elle contestait «fermement» les conditions d’attribution à Canal des droits télévisuels du Top 14 de rugby en janvier. 

Selon une analyse de la banque Natixis, la chaîne qatarie reste lourdement déficitaire. Elle a vu ralentir son recrutement d’abonnés depuis quelques mois et pourrait donc se révéler très agressive lors des deux prochains appels d’offres du football, ceux de la L1 le 4 avril et de la Ligue des champions qui sera clôturé 7 avril, ce qui lui permettrait de largement dépasser les deux millions d’abonnés. Mais même dans ce cas, BeIn perdrait encore plus de 350 millions d’euros en France en 2014, selon la banque, après avoir déjà enregistré plusieurs centaines de millions de pertes depuis son lancement.