Cinéma : avec «A Ciambra», le réalisateur Jonas Carpignano donne la parole à ceux qui vivent en marge

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Un récit d’initiation dans une famille rom en Calabre. Un film adoubé et produit par Martin Scorsese. Des acteurs non professionnels qui crèvent l’écran : avec «A Ciambra», le réalisateur Jonas Carpignano donne avec talent la parole à ceux qui vivent en marge. «Il ne s’agit pas de faire un manifeste», a confié le cinéaste italo-américain lors d’un passage à Paris. «Ce qui m’intéresse, ce sont les gens, plus que les idées».

Dans «Mediterranea» (2015), le réalisateur né à New York et aujourd’hui installé dans le sud de l’Italie, s’était penché sur le sort des migrants en suivant le parcours de deux Burkinabés arrivés en Calabre. L’un des deux, Koudous Seihon, est devenu son ami et tient de nouveau un rôle important dans son deuxième film.

Dans «A Ciambra», Jonas Carpignano suit les traces de Pio, 14 ans, qui rêve de devenir un caïd comme son frère aîné. Quand celui-ci se retrouve en prison, l’adolescent tente de prendre sa place et de s’afficher comme l’homme de la maison en vivant de petites arnaques.

Écartelé entre son appartenance à sa famille (nombreuse) et son amitié peu évidente pour Ayiva, un migrant africain qui lui rend des petits services, il va chercher sa voie. Présenté au printemps à la Quinzaine des réalisateurs, le film est porté par l’énergie de Pio Amato, de presque tous les plans. Moue adolescente, physique de gamin qui fume et veut faire la loi, il joue dans «A Ciambra» entouré de sa propre famille, ce qui donne des allures de cinéma-vérité à l’ensemble.

Tout est parti d’une rencontre, explique le réalisateur de 33 ans qui a croisé la route de Pio quand celui-ci avait 9 ans (il en a aujourd’hui 16) dans des circonstances rocambolesques, à la suite d’un vol de voiture pendant un tournage.

Fasciné par l’«énergie» dégagée par la famille Amato et cette communauté rom installée, il va proposer de faire tourner Pio et son grand frère. Ce qui débouchera sur un court métrage, «embryon» du long métrage, en salles mercredi. Sur près de deux heures, le film fait le portrait d’une famille et d’un garçon entre deux âges, qui fait parfois penser au cinéma de Scorsese («Les Affranchis» notamment).