Fox Business contre CNBC ou la guerre des chaînes de télévision financière

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    Le 15 octobre, les téléspectateurs américains pourront regarder Fox Business, la nouvelle chaîne financière de l’empire des médias News Corp., qui veut être une chaîne populaire sur l’argent et détrôner la reine du secteur, CNBC. Rupert Murdoch, patron de News Corp., avait annoncé le lancement de Fox Business début 2007, peu avant de lancer une OPA sur le «Wall Street Journal», le prestigieux quotidien financier qu’il a acheté cet été pour plus de 5 milliards de dollars. Au départ, «Fox Biz» n’aura que le tiers du potentiel de CNBC: elle sera accessible dans 34 millions de foyers américains, contre 90 millions pour CNBC (groupe General Electric), et 49 millions pour Bloomberg TV, autre ténor de l’information financière, qui s’adresse plutôt aux professionnels. Mais M. Murdoch, roi des tabloïds populaires, a de grandes ambitions pour sa chaîne: son pari est de conquérir l’homme de la rue, au contraire de CNBC, surtout regardée dans les foyers fortunés et les salles de marché. «Nous serons très différents de CNBC», a-t-il déclaré récemment devant des analystes. «CNBC est une chaîne pour Wall Street. Nous sommes pour Main Street (la grand’rue). Ils (CNBC) insistent trop sur les échecs, les scandales et la politique. Nous voulons nous concentrer sur l’innovation, le succès, les gens qui gagnent de l’argent», a-t-il lancé. Le site de la chaîne donne un avant-goût de son style, qui se veut anti-jargon, pédagogique et défenseur du «rêve américain». Des particuliers témoignent ainsi de leur amour de l’argent: leurs parents ne leur en parlaient jamais et ils disent le regretter, appellent à ne pas avoir honte d’en gagner, à ne pas en avoir peur. «La plupart des milliardaires le sont devenus à partir de rien»… «Il faut que la Bourse soit accessible à tous»… «Les informations financières ne sont pas ennuyeuses mais palpitantes», lancent-ils. Pour l’instant, les amateurs d’informations en continu sur les bénéfices des entreprises ou les cours de Bourse ne sont pas légion, même si ce public généralement aisé est prisé des publicitaires. CNBC avait en août, en moyenne quotidienne, 87 000 spectateurs de 25-54 ans. Ce segment de marché est porteur: en août, l’audience de CNBC avait augmenté de 50% par rapport à août de l’année précédente, selon le cabinet Nielsen. Fox Business (FBN) profitera aussi de la popularité du boursicotage chez les Américains, dont 60% détiennent des actions, contre 20% il y a 25 ans, selon la fédération professionnelle Securities Industry Association. Rupert Murdoch a déjà réussi d’autres paris, notamment en propulsant sa chaîne Fox News numéro un de l’information continue aux Etats-Unis, devant CNN. Selon Derek Baine, du cabinet SNL Kagan, Fox Business pourrait attirer des spectateurs de tous horizons, en plus de CNBC, où la future chaîne fait déjà de la publicité. Les deux chaînes se disputeront aussi largement les mêmes annonceurs, selon SNL Kagan. CNBC a encaissé 245 millions de dollars en publicités en 2006 et un bénéfice opérationnel de 335 millions. Pour mieux résister, CNBC vient de moderniser sa grille pour proposer des émissions plus grand public. Même Bloomberg a décidé de rendre sa présentation un peu moins austère. Fox Business a embauché quelques vedettes, comme l’animateur de radio Tom Sullivan, après avoir tenté en vain, selon la presse, de débaucher les stars de CNBC. Les deux chaînes se disputeront aussi le «Wall Street Journal», acheté par Murdoch mais qui jusqu’en 2012 a un accord exclusif de fourniture d’informations à CNBC. M. Murdoch compte utiliser le WSJ pour fournir à Fox Business des nouvelles non-financières, qui ne sont pas incluses dans l’accord avec CNBC.