Jugée assujettie au Parti communiste chinois, la chaîne CGTN perd sa licence au Royaume-Uni

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Jugée assujettie au Parti communiste chinois, la chaîne publique chinoise d’informations en anglais CGTN a perdu sa licence au Royaume-Uni, une mesure risquant d’envenimer davantage les relations entre Londres et Pékin. Dans un communiqué, le régulateur britannique des médias a expliqué jeudi que le droit d’émettre avait été accordé à la société Star China Media Limited qui en réalité «n’exerce pas de responsabilité éditoriale sur le contenu diffusé par CGTN». Une demande de transfert de cette licence à l’entité contrôlant réellement la chaîne n’était pas possible car cette dernière «est contrôlée par le Parti communiste chinois», est-il précisé. «Nous avons donné beaucoup de temps à CGTN pour se conformer aux règles», qui interdisent notamment au détenteur d’une licence d’être contrôlé par un organe politique, a détaillé l’Ofcom. Cette décision risque de crisper davantage les relations entre le Royaume-Uni et la Chine. Peu après sa publication, le ministère chinois des Affaires étrangères, sans faire référence au cas de CGTN, a accusé la BBC d’avoir diffusé de «fausses informations» et de «parti pris idéologique» fin janvier dans une vidéo traitant de la pandémie en Chine. Il a exigé des excuses du groupe audiovisuel public britannique et souligné que «la Chine se réserve le droit de prendre des mesures supplémentaires». Sur Twitter, la BBC a rejeté en bloc ces «accusations infondées», assurant avoir rendu compte de manière «exacte et équitable» des événements en Chine. Les relations entre les deux pays étaient déjà mises à mal par la condamnation par Londres de la loi controversée sur la sécurité chinoise à Hong Kong et la répression des mouvements pro-démocratie, qui l’a conduit à accorder un passeport spécial britannique à certains ressortissants de l’ex-colonie. La Chine avait répliqué qu’elle ne reconnaîtrait pas ces passeports, délivrés après la décision du gouvernement du Premier ministre Boris Johnson d’étendre les droits de résidence de ces ressortissants sur le sol britannique. Dans ce contexte déjà tendu, le Royaume-Uni a aussi dénoncé la «barbarie» de Pékin envers les Ouïghours et annoncé début janvier des mesures pour empêcher les marchandises liées au travail forcé présumé de cette minorité musulmane de la région du Xinjiang d’arriver jusqu’aux consommateurs britanniques. Les autorités chinoises avaient immédiatement dénoncé une «attaque purement politique». Autre sujet qui fâche, l’exclusion par Londres de l’équipementier chinois Huawei, accusé d’espionnage par Washington, de son réseau 5G. Un projet de loi en ce sens a été présenté en novembre dernier au Parlement. Le régulateur britannique des médias a par ailleurs dit qu’il statuerait «bientôt» sur une procédure de sanction visant la chaîne étatique CGTN pour une couverture jugée partiale, injuste et contraire au respect de la vie privée. En juillet, le régulateur avait épinglé la chaîne étatique pour le traitement infligé à un ex-détenu britannique, le journaliste Peter Humphrey, lors de la couverture de son arrestation en Chine. Peter Humphrey, qui travaillait en Chine en tant qu’enquêteur privé pour le compte du géant pharmaceutique GlaxoSmithKline, avait été arrêté puis condamné, en août 2014, à deux ans de prison pour violations des lois chinoises sur la vie privée. Il avait été libéré et expulsé en 2015. Peter Humphrey s’était plaint auprès de l’Ofcom, qui avait jugé sa plainte «fondée», de «traitement injuste» et d’«atteinte à la vie privée» après la diffusion, en août 2013 et en juillet 2014, de deux programmes d’information par la chaîne qui s’appelait alors CCTV News, où il était présenté notamment comme un «suspect» qui était passé aux aveux. En mai 2020, l’Ofcom avait déjà mis en cause CGTN pour partialité lors de la couverture des manifestations pro-démocratie à Hong Kong en 2019.