«Le SPI ne cédera rien, ni à la concentration, ni à la dépendance.»

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Catherine BERTIN, Catherine BERTIN, Déléguée générale du SPI

France Télévisions a signé en fin de semaine dernière un accord avec les syndicats de producteurs pour réaliser davantage d’oeuvres dont le groupe public détiendra en partie les droits d’exploitation. Réactions de Catherine BERTIN, Déléguée générale du SPI (Syndicat des producteurs indépendants). 

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En quoi l’accord signé entre France Télévisons et les producteurs va-t-il rénover les relations entre le service public et les créateurs de contenus ? 

Catherine BERTIN

L’accord signé entre France Télévisions et les producteurs indépendants s’inscrit dans une relation de confiance. Au vu de la mutation très profonde du paysage audiovisuel, ce protocole d’accord établissant un nouvel équilibre entre la production indépendante et France Télévisions, nous semblait nécessaire. L’affaire Newen a créé un effet de sidération dans l’ensemble du secteur. D’ailleurs, le SPI était déjà particulièrement attentif au risque de concentration dans le secteur audiovisuel. La création et la diversité culturelle ont tout à perdre avec la concentration. De notre point de vue, Delphine Ernotte a un réel engagement avec le service public, la création et la diversité culturelle. La présidente de France Télévisions a très vite réussi à nous convaincre.

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L’accord prévoit un investissement par France Télévisions dans la création de 20% de son chiffre d’affaires (soit au moins 400 M€/an). Est-ce une 1ère étape avant d’aller plus loin ? 

Catherine BERTIN

Nous avons signé un accord global qui comprend un chiffre qui nous convient. Nous espérons qu’il puisse croître un peu. Cela dépendra du Contrat d’Objectifs et de Moyens (COM) de France Télévisions qui n’est pas encore arrêté aujourd’hui. Nous sommes très sereins. Pour rappel, l’accord avec le groupe public prévoit une part de production indépendante de 75% des investissements dans la création. Et puisque notre intérêt est de produire beaucoup, il nous a paru naturel que France Télévisions et la production indépendante prennent des engagements mutuels sur la durée des droits, l’exploitation sur les plateformes numériques, la circulation des oeuvres et le partage de la valeur.

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Le SPI est-il serein sur l’avenir de la production indépendante ? 

Catherine BERTIN

Avec l’évolution accélérée du secteur nous sommes un peu inquiets. Le phénomène des concentrations ne va pas s’arrêter. L’entrée dans le grand marché du numérique sera notre prochain rendez-vous. La Commission Européenne vient de publier ses premiers textes le 9 décembre dernier. Ils s’intéressent à deux sujets : 1) la portabilité des abonnements numériques en Europe. Une mesure à destination des consommateurs qui s’inscrit dans la stratégie du marché unique du numérique. Et 2), la mise en chantier de la réforme du droit d’auteur. En France, ce principe nous garantit la patrimonialité des oeuvres, socle de l’ensemble du dispositif de création et de production. Pour avoir lu les déclarations de la Commission Européenne, je crains fort que tout cela soit considéré comme un obstacle à la circulation générale des biens culturels sur un grand marché numérique. Ce dossier va concerner tous les secteurs.

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D’autres chantiers en cours pour le SPI ? 

Catherine BERTIN

Nous travaillons actuellement avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Nous réfléchissons justement à tous ces phénomènes de concentration dans le secteur.