Netflix/ «Chaos d’anthologie: Woodstock 99» : un documentaire choc sur ce festival américain devenu cauchemar

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Incendies, pillages, déluge de drogues, agressions sexuelles: «Chaos d’anthologie: Woodstock 99», documentaire choc sur Netflix, revient sur ce festival américain devenu cauchemar, désastre encore trop méconnu et jamais dépeint jusqu’ici dans tous ses dysfonctionnements. Au lendemain de l’évènement, fin juillet 1999, qui devait célébrer les 30 ans du Woodstock originel, les journaux télés, de Paris à Tokyo, n’ont relayé succinctement que l’épais panache de fumée noire s’élevant d’un site dévasté, symbole du fiasco. L’inventaire de cet épisode tourmenté de l’industrie musicale n’a commencé à se dévoiler qu’en 2021 avec un premier documentaire, «Woodstock 99, peace, love and rage» sur HBO. «Chaos d’anthologie: Woodstock 99», réalisé par Jamie Crawford et proposé sur Netflix, va plus en profondeur. Une montagne de témoignages est collectée et recoupée sur 3 épisodes d’environ une heure chacun (organisateurs, festivaliers, journalistes, secouristes, agents de sécurité, responsables de santé publique etc). «C’était la chute de Hanoï» décrit dans «Chaos d’anthologie: Woodstock 99» Tim Healy, producteur télé à l’époque sur place, parlant du dernier soir. «On se croirait dans «Apocalypse Now»» s’exclame dans des images d’archives Anthony Kiedis, leader des Red Hot Chili Peppers quand le groupe revient sur scène pour le rappel. Des brasiers se multiplient alors sur le site. Des milliers de festivaliers (les spots publicitaires de l’époque vantent 250.000 personnes au total), à qui on a distribué 100.000 bougies, allument des feux et y jettent tout ce qui peut brûler. Ivres tout court ou ivres de colère après avoir été massés dans des conditions indignes sur une ancienne base aérienne militaire de l’Etat de New York. Les réservoirs de camions d’organisation garés plus loin exploseront gagnés par les flammes tandis que des pillards s’attaqueront, entre autres, à l’espace merchandising et aux distributeurs d’argent liquide. Comment en est-on arrivé là? Lee Rosenblatt, 22 ans à l’époque, assistant-manager du site pointe «la cupidité» des responsables: «on a profité de ces gamins». Les organisateurs, ce sont Michael Lang, père fondateur du Woodstock de 1969 (décédé récemment) et son «associé puissant» pour l’anniversaire des 30 ans, John Scher, promoteur. Tous deux témoignent dans «Chaos d’anthologie: Woodstock 99». Le 1er apparaît dépassé par l’évènement-monstre créé tandis que le 2nd avoue ses motivations: «Il fallait absolument faire du profit». Une bouteille d’eau à 65 cents en ville est vendue 4 dollars dans le festival, alors qu’on force les festivaliers à vider leur gourde à l’arrivée sur le tarmac de bitume du site chauffé à blanc par des températures de plus de 35°. Parallèlement, les coûts d’organisation ont été rognés. «Woodstock 99 n’avait pas assez d’agents de sécurité convenables (…) ils ont voulu radiner», dénonce encore Colin Spear, dans la production de l’époque. Les drogues circulent trop librement, les effectifs de sécurité ont été recrutés à la va-vite et pas suffisamment formés. La Garde nationale sera appelée à la rescousse au terme du festival. Mais Woodstock 99 bascule déjà à mi-parcours pendant la rave sous un hangar. Le set du DJ-star Fatboy Slim est arrêté: un van a été détourné par un festivalier et roule au ralenti dans le public. A.J. Srybnik, superviseur de la rave à l’époque, raconte sur Netflix que le chauffeur-fêtard au volant est dans un état second. Ce responsable découvre «écoeuré» à l’arrière de la camionnette «une fille de 15 ou 16 ans (…) pantalon sur les chevilles, évanouie» tandis qu’un jeune homme se rhabille à côté. Les médias américains finiront par évoquer des «allégations de viols», à une époque pré-#MeToo où les agressions sexuelles en festival sont cachées sous le tapis.