Québec: le journal «La Presse» vers le tout numérique

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Le groupe canadien de médias Gesca a vendu mercredi tous ses journaux régionaux au Québec pour se recentrer sur son unique quotidien montréalais «La Presse», avec l’objectif de vendre à l’international la technologie d’un journal entièrement gratuit sur tablette.Près de deux ans après le lancement de LaPresse+, l’édition entièrement numérique de son quotidien, le groupe Gesca a clairement défini une stratégie assise sur le maintien d’un seul quotidien et sur la vente de technologies. «Le taux de pénétration des tablettes dans les foyers ruraux et les services internet des opérateurs» hors des centres urbains «n’était pas suffisamment élevé pour justifier un modèle numérique» pour les six titres régionaux de Gesca, a indiqué son PDG Guy Crevier. C’est le tout nouveau Groupe Capitales médias, créé pour l’occasion, qui a acheté les six journaux régionaux québécois, soit les quotidiens «Le Soleil» (de la ville de Québec), «Le Nouvelliste» (Trois-Rivières), «Le Droit» (Ottawa et Gatineau), «La Tribune» (Sherbrooke), «Le Quotidien» (Chicoutimi) et «La Voix de l’Est» (Granby). 

A la tête de Groupe Capitales médias et unique propriétaire, l’ancien ministre canadien de la Justice Martin Cauchon veut «une presse régionale forte» au Québec et croit que le papier a encore un avenir immédiat même si à terme une stratégie numérique est envisageable, sinon nécessaire. Martin Cauchon a rappelé «l’inconfort» qui semblait prévaloir au sein du groupe Gesca ces derniers mois avec l’ambivalence entre numérique et papier sachant que le contenu du quotidien «La Presse», dans sa version papier, était de plus en plus maigre au profit de la version tablette qui s’enrichit régulièrement de nouvelles rubriques. Pour Gesca, l’objectif est donc d’arriver à la rentabilité avec un journal entièrement financé par les annonceurs. D’ores et déjà, les recettes de Gesca sont à 70% assurées par la publicité, dont 60% uniquement sur LaPresse+ et le reste sur les mobiles ou le site internet. «Nous sommes les 1ers au monde à avoir atteint un chiffre aussi élevé que cela», a affirmé Guy Crevier. La stratégie n’est plus de distribuer le plus de journaux dans le plus grand nombre de foyers, et donc de multiplier les titres, mais «il est clair pour nous que c’est LaPresse+ et la commercialisation de LaPresse+ à l’étranger». Côté tendance des recettes publicitaires, la stratégie semble porter ses fruits, l’objectif est maintenant de développer l’autre volet. Pour cela, Guy Crevier a annoncé la création d’une filiale dédiée à la vente de technologie et de formation des équipes afin que d’autres groupes de presse se lancent sur une édition numérique à partir de la technologie Gesca. «Toutes les semaines des groupes de presse étrangers, européens ou américains, viennent à Montréal voir le fonctionnement de ce nouveau média numérique», a souligné Guy Crevier et les équipes de Gesca parcourent les continents pour vanter leur produit. Premier acheteur de cette technologie, le Toronto Star – plus gros tirage papier des quotidiens canadiens -, va avoir dès l’automne son édition pour tablettes entièrement gratuite, et va abandonner le mois prochain son mur payant pour son site internet. Si le «Toronto Star» va garder son édition papier, «La Presse» a, dès le lancement de son édition tablette, prévu à terme l’abandon du papier, un objectif réaffirmé l’an dernier par les propriétaires, les frères Desmarais via Power Corporation. La date n’est pas fixée et «ce sont les conditions de marché qui détermineront la fin du papier», a assuré le patron de Gesca, soit quand les annonceurs auront migré leur stratégie publicitaire sur le nouveau support. Le montant de la vente des six journaux n’a pas été révélé et c’est Claude Gagnon, qui dirigeait depuis 2009 les six journaux pour Gesca, qui sera le PDG de ces six titres.