Rendez-vous des fans de cinéma fantastique, le festival de Gérardmer retrouve les salles

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Rendez-vous des fans de cinéma fantastique, le festival de Gérardmer (Vosges) retrouvait les salles mercredi pour une édition pleine de villages hantés, d’enfants aux pouvoirs surnaturels et de rites maléfiques, qui ferait presque oublier la pandémie et ses angoisses. «On est dans une période très angoissante, et le fait de voir des films qui se passent dans l’irréel permet de rêver, de sortir de sa réalité», explique la présidente du jury, l’actrice, productrice et réalisatrice Julie Gayet. Avec les autres membres du jury, dont le réalisateur Alexandre Aja («La Colline a des yeux») ou l’actrice et réalisatrice Valérie Donzelli, elle jaugera les dix films en compétition. Six réalisateurs et 4 réalisatrices sont en lice jusqu’à dimanche pour succéder à Brandon Cronenberg, le fils de David Cronenberg, qui avait obtenu l’an dernier le Grand Prix pour «Possessor». Le festival avait alors dû se tenir en ligne, en raison de la crise sanitaire. Mais cette année, le grand frisson est à nouveau garanti dans les salles. «Le fantastique est un genre éternel, qui offre beaucoup de liberté aux créateurs», explique le directeur du festival Bruno Barde: «il y a plein de nouveaux pays qui s’y intéressent, ce qui traduit aussi l’angoisse et l’inquiétude qui nous entourent». Au total, une quarantaine de films venus de 17 pays seront présentés. Après des années américaines, ou asiatiques, c’est désormais l’Europe qui a la part belle dans la sélection, avec seulement deux films américains et un tourné à Taïwan en compétition. L’Espagnol Paco Plaza, connu pour la trilogie de films d’horreur «[Rec]», présentera «La Abuela», qui brouille les frontières du temps et des générations en filmant le huis clos entre une jeune mannequin et sa grand-mère, qui vit lourdement handicapée dans son appartement madrilène. Eskil Vogt proposera «The Innocents», un film où il est question d’enfants aux pouvoirs surnaturels. Ce Norvégien est connu comme le grand complice de Joachim Trier puisqu’il a co-scénarisé ses films, dont le dernier, la comédie dramatique «Julie (en 12 chapitres)», a été l’une des sensations du dernier festival de Cannes. L’Américain Sean Ellis («Cashback») présentera «Eight for Silver», tourné en France, explorant un village de campagne du XIXe siècle frappé par une malédiction. Le réalisateur français Arnaud Malherbe est sur les rangs avec, «Ogre», qui imagine les événements mystérieux entourant l’arrivée d’une institutrice et de son fils dans un village du Morvan, avec en tête d’affiche l’actrice Ana Girardot. Certains films s’annoncent «insoutenables» de l’aveu même des organisateurs, à l’instar de «The Sadness» du Canadien Rob Jabbaz, tourné à Taïwan, expérience «d’extrême horreur» où il est question d’un virus transformant les humains en être sadiques, présentée comme «au bord du supportable»… Hors compétition seront projetés «After Blue (Paradis sale)», de Bertrand Mandico, membre du jury et Prix Louis-Delluc 2018 avec «Les Garçons Sauvages», mais aussi un documentaire sur Joe D’Amato, un réalisateur mort en 1999 et connu comme «le roi du porno italien», mais qui a aussi travaillé avec Jean Renoir, Jean-Luc Godard ou Franco Zeffirelli. Une diversité qui témoigne de la façon dont le fantastique et le genre ont fini ces dernières années par infuser «dans toutes les cinématographies», selon Julie Gayet. «Le genre explose» et c’est désormais dans le fantastique «que l’on voit les auteurs émerger», poursuit celle qui «rêverait» de tourner dans un film d’Edgar Wright («Shaun of the Dead»), l’un des invités du festival. Elle en veut pour preuve le parcours de Julia Ducournau, dont elle avait co-produit en 2016 le film «Grave». Primée pour ce thriller cannibale, la jeune cinéaste française accédait à la consécration l’été dernier, au Festival de Cannes, lorsque le président du jury lui remettait la Palme d’Or pour «Titane», Ovni ultraviolent et féministe.