BeIN s’est imposé en 4 ans comme le principal diffuseur de football en France

231

«J’ai confiance en Didier (Deschamps), mais je sais ce que j’aurais fait à sa place»: Marcel Desailly fulmine en loges à la première période du match France-Eire, dimanche à Lyon, où il joue le consultant de luxe pour beIN Sports, le groupe qui vit de l’Euro 24h/24 depuis deux semaines. Pendant les deux heures précédant le match, derrière un pupitre posé sur la pelouse, le champion du monde de France 98 a délivré ses analyses pour les caméras du groupe qatari qui s’est imposé en quatre ans comme le principal diffuseur de football en France à la place de Canal+. A ses côtés, en costume-cravate de rigueur, l’ex-champion du monde Robert Pirès et l’entraîneur réputé d’Arsenal, Arsène Wenger. Ces consultants négociés à prix d’or symbolisent la stratégie du groupe, qui met le football et les autres sports en scène comme un spectacle premium, pour rentabiliser à terme ses investissements faramineux.Depuis son arrivée en France en 2012, beIN a raflé à la chaîne cryptée la diffusion des principales compétitions sportives sur le marché, du football français à la NBA en passant par le tournoi de tennis de Wimbledon. Grâce à l’Euro, acheté 60 millions d’euros et qu’elle diffuse en intégralité pour la deuxième fois, le groupe a annoncé vendredi avoir dépassé les trois millions d’abonnés à 13 euros par mois, et atteindre régulièrement le million de téléspectateurs, selon la chaîne. «On a fait le plus dur», considère Florent Houzot, ancien de France Télévisions devenu directeur de la rédaction de beIN Sports en France. «Le plus important, c’est maintenant de satisfaire les abonnés qu’on a conquis», souligne-t-il, alors qu’un accord de distribution avec Canal+ a été rejeté début juin par l’Autorité de la concurrence. Le dirigeant compte surtout exporter ces droits «premium». Sur la pelouse du Parc OL, à droite des experts, un journaliste présente le match en arabe pour les chaînes beIN du Moyen-Orient et du Maghreb. Le match est aussi commenté en anglais pour les Etats-Unis et l’Asie. La chaîne devrait faire jouer ces synergies lors des deux prochaines Coupes du Monde, dont elle détient les droits. En France, BeIN compte surtout sur une victoire en Ligue des champions du PSG, l’équipe de son propriétaire qatari, et l’éventuel exploit d’un ou deux autres clubs français qui mobiliseraient les fans de foot, assure son directeur.

La chaîne revendique aussi un ton positif pour raconter le football, comme dans l’émission à paillettes qui résume chaque soir en direct et en public la journée de compétition. Ce dimanche, le comédien Francis Huster donne son avis sur les matchs du jour dans l’»Euro-Show», entouré de l’ex-champion d’Europe français Luis Fernandez et de deux anciennes gloires, le néerlandais Ruud Gullit et l’Italien Christian Vieri. Ces recrues internationales apparaissent plusieurs dizaines de fois par an sur les antennes du groupe, dans le monde entier. Au programme de cette émission tournée dans les sous-sols de l’ancien siège de Canal+ à Paris: des échanges d’experts et un quizz. «J’essaie d’amener du sourire à l’analyse des matchs de foot», explique le présentateur Darren Tulett, l’ex-Monsieur foot anglais de Canal+. Lors du match des Bleus contre l’Albanie, la presse avait reproché à la chaîne de n’avoir pas diffusé des images du milieu Paul Pogba, le montrant sur le terrain en train de faire une sorte de bras d’honneur. «Il n’y a pas de censure, nous n’étions pas les seuls à avoir ces images», explique Florent Houzot. «On ne les a pas diffusées pour ne pas créer de polémique inutile à la fin d’une rencontre. Contrairement à d’autres, nous avons les images des matchs, nous n’avons pas besoin de créer de «buzz»».