Chris CHIBNALL, Créateur, auteur et producteur executif de «Broadchurch»

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Interrogé vendredi dernier dans le cadre du FIPA de Biarritz, Chris CHIBNALL, créateur, auteur et producteur exécutif de la série «Broadchurch», mais aussi scénariste de «Torchwood» et «Doctor Who», a tenté de nous expliquer les recettes de ces succès télévisuels internationaux.

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La série «Broadchurch» est un succès international. Avez-vous déjà réfléchi concrètement aux recettes de ce succès ?

Chris CHIBNALL

Vous savez, personne ne connaît les véritables clés du succès à la télévision. Tous ceux qui prétendent les maîtriser, vous mentent. Pour obtenir le meilleur d’une série, vous devez initialement vous concentrer sur l’essence même d’une idée. Vous vous demandez ensuite comment l’exprimer visuellement, émotionnellement et narrativement. Autre interrogation indispensable : quel est votre public ? Vous adressez-vous à une audience de masse ou de niche ? Cette question ouvertement stratégique vise à faciliter la connexion entre votre histoire et ceux qui l’écoutent. Avec ces premières clés, vous pouvez aisément conserver votre intention durant la construction de l’histoire. Sur la série «Broadchurch», nous nous adressons à une large audience (ITV en Angleterre, ndlr) autour d’une idée simple : parler de choses terribles (un meurtre) dans un lieu magnifique. Et pour dialoguer avec une audience de masse, vous devez miser sur l’émotion. En fonctionnant ainsi, vous avez toutes les chances d’être connecté à votre public. Les meilleurs dramas reposent sur l’émotion. 

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Quelles sont vos meilleures astuces pour construire une intrigue de série ?

Chris CHIBNALL

Je travaille avec une ou deux personnes. Nous avons un grand tableau blanc découpé en trois parties et sur lequel nous inscrivons tous les éléments (personnages, réactions, déplacements) qui participent à l’intrigue. Nous possédons ainsi une visibilité sur les huit épisodes d’une série. Nous avons une sorte de grande fresque chronologique qui nous permet de situer les actions du début à la fin. Ensuite, nous remplissons les cases, étape après étape. Sur «Broadchurch», nous écrivons la série de la fin, au début. Cela permet de clarifier nos intentions. Cela permet aussi d’intégrer de fausses pistes pour le téléspectateur. Enfin, nous échafaudons généralement un épisode en quatre actes. Nous intégrons jusqu’à six situations rythmiques dans chaque partie.

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Est-il vrai que la production de «Broadchuch» a eu beaucoup de mal à conserver le mystère autour de la série ?

Chris CHIBNALL

Oui, c’est un travail très difficile. Sur la 1ère saison, personne ne nous attendait au tournant. Face au succès rencontré en saison une, la difficulté a été de conserver le mystère sur la 2ème. C’est pourquoi l’intégralité de notre équipe ainsi que toutes les personnes entourant la production ont signé un contrat de confidentialité. Concernant une potentielle saison 3, j’ai déjà une histoire en tête. Mais je ne ferais pas de 5ème ou 6ème saison. Je veux que la série se consomme comme un roman.

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Avez-vous créé «Broadchuch» comme un format potentiellement adaptable ?

Chris CHIBNALL

Non, pas du tout. J’ai juste écrit une histoire. Je n’ai jamais pensé que cette série pouvait avoir autant de succès, aussi bien en Angleterre que dans le monde entier. Et lorsque je vois les adaptations aux Etats-Unis et en France (par Shine France, ndlr), c’est une vraie surprise, mais aussi le meilleur compliment que l’on puisse me faire.