Drahi entreprend de constituer un nouveau groupe médias

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Déjà à la tête d’un empire dans les télécoms et principal actionnaire de Libération, l’homme d’affaires Patrick Drahi, patron d’Altice (SFR, Numericable..), a entrepris de constituer un nouveau groupe médias comprenant les 20 magazines et sites français du belge Roularta et la chaîne israélienne i24 News. 

Las d’essuyer des pertes récurrentes sur un marché français de la presse plombé par le recul de la publicité, le géant belge des médias Roularta a décidé de vendre en bloc des titres rachetés en 2005-2006, qui constituent ensemble le 5e pôle de magazines français. Parmi eux «L’Express», 2ème news magazine du pays, le mensuel «L’Expansion», «L’Etudiant» et ses salons, «Lire» ou encore le people «Point de Vue», ainsi que des sites d’emploi et une quinzaine de magazines spécialisés dans la décoration ou les loisirs. Le prix d’acquisition pourrait être de l’ordre de quelques dizaines de millions d’euros, selon une source proche du dossier. Il s’ajoutera aux 24 millions déboursés par Patrick Drahi l’an dernier pour renflouer «Libération».  

Avec le quotidien et ce nouveau pôle magazine, Patrick Drahi, 4e fortune de France selon «Forbes», crée un nouveau groupe média baptisé Altice Media Group, fort déjà d’environ 300 millions de c.a., qu’il compte bien continer à développer dans l’audiovisuel, le numérique et à l’international. Il est associé dans cet investissement à son ami Marc Laufer, qui apporte dans la corbeille ses titres de presse professionnels et deviendra DG d’Altice Media, tandis que Bernard Mourad, ancien banquier de Morgan Stanley et proche de Drahi, en sera le président. Le groupe intègrera aussi la chaîne d’information en continu israélienne i24 News, basée à Tel Aviv, qui émet en français, anglais et arabe et que Drahi a lancée en 2013 comme une alternative à Al-Jazeera. De nationalité franco-israélienne, Patrick Drahi possède par ailleurs le groupe israélien de télévision et de téléphonie mobile Hot. Initialement, Roularta ne comptait vendre à Patrick Drahi que «L’Express», «L’Expansion» et quelques titres moins importants, en conservant les plus rentables, notamment «L’Etudiant» et les salons organisés par le magazine, que convoitait «Le Figaro». Finalement, Drahi et Laufer ont convaincu Roularta de leur vendre l’ensemble («L’Express», «L’Expansion», «Live», «Classica», «Lire», «Pianiste», «Mieux Vivre Votre Argent» et «Studio Cine Live», les salons professionnels Job Rencontres, les sites Distrijob et lentreprise.fr, L’Etudiant et ses salons, le magazine people «Point de Vue», les magazines de déco «Côté Sud», «Côté Ouest», «Côté Est», «Côté Paris», «Maison Française Magazine», le magazine de cuisine «Zeste», les gratuits «A Nous Paris» et ses équivalents à Marseille, Lyon et Lille…). Ce pôle emploie aujourd’hui 600 personnes, dont 315 journalistes (136 à «L’Express»). 

Pour l’homme d’affaires, les montants investis dans les médias sont sans commune mesure avec ses acquisitions dans les télécoms, réalisées via des emprunts géants. Il a ainsi racheté Numéricable, puis l’an dernier SFR pour 13,4 milliards d’euros, Virgin Mobile et enfin tout récemment Portugal Telecom pour 7,4 mds. Mais la plupart des titres de presse qu’il vient d’acquérir sont pour l’instant déficitaires. Roularta a d’ailleurs précisé jeudi que quand la transaction serait finalisée, il déprécierait «de 140 à 150 millions d’euros» la valeur de son pôle de magazines français, jusqu’ici valorisé 220 millions. Un reflet du déficit chronique de cette branche qui avait déjà amputé ses comptes de 40 millions d’euros en 2013. 

Quant à Libération, dont les ventes ont chuté l’an dernier, il a affiché en 2014 une perte d’exploitation de 9 millions d’euros.