Favoritisme à l’INA: condamné, Mathieu Gallet fait appel

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Il ne démissionnera pas et il fait appel: condamné à un an de prison avec sursis pour «favoritisme» lorsqu’il dirigeait l’Institut national de l’audiovisuel (INA), le patron de Radio France Mathieu Gallet a réaffirmé son innocence lundi par voie d’avocats. M. Gallet, à la tête de l’INA entre 2010 et 2014, est soupçonné d’avoir favorisé 2 sociétés de conseil auxquelles l’établissement public a versé plus de 400.000 euros. Le tribunal correctionnel de Créteil lui a également infligé une amende de 20.000 euros. Ses avocats vont toutefois faire «immédiatement appel», ont-ils annoncé. «Evidemment, M. Gallet ne démissionnera pas de Radio France», ont ajouté les avocats, Christophe Ingrain et Rémi Lorrain. Le PDG de la maison ronde avait déjà annoncé qu’il comptait aller au terme de son mandat, prévu en mai 2019, même en cas de condamnation. «La décision du tribunal n’est pas une surprise», ont réagi les avocats. Lors du procès mi-novembre, ils avaient dénoncé «une enquête à charge» et dessiné en creux l’hypothèse d’un règlement de comptes entre hauts fonctionnaires. L’instruction ne donne selon eux la parole «qu’aux soldats d’Agnès Saal», la successeure de M. Gallet aux commandes de l’INA. C’est par une polémique sur les frais exorbitants de Mme Saal que l’affaire avait démarré en 2015. Ce scandale avait forcé la dirigeante à démissionner et avait déclenché un signalement du ministère de la Culture sur la gestion passée de l’INA, qui a servi de base pour l’enquête pour «favoritisme» contre M. Gallet. La condamnation de M. Gallet «est une vraie satisfaction: le droit est passé», a jugé Jérôme Karsenti, avocat de l’association Anticor, partie civile dans le dossier. La justice, qui avait déjà condamné Mme Saal pour ses frais de taxis, «a rappelé que lorsqu’on est responsable d’un établissement public, géré avec des deniers publics, on se doit de le gérer avec rigueur et responsabilité», a commenté le conseil. Tout en regrettant les choix faits pendant l’enquête. «On est passé à côté d’un grand procès, qui aurait pu juger Mme Saal et M.Gallet ensemble, sur un dysfonctionnement global au sein d’un organisme public aussi important que l’INA», a estimé M. Karsenti. En novembre, le procès de M. Gallet s’était concentré sur 2 entorses au code des marchés public. Le 1er volet de l’affaire concernait l’entreprise Balises de son consultant Denis Pingaud. Ce professionnel de l’audiovisuel était utilisé par l’INA comme «conseiller externe». Rémunéré 5.000 euros par mois, il a perçu 130.000 euros hors taxes. Un total qui aurait dû forcer l’établissement de Bry-sur-Marne (Val-de-Marne) à mettre sa société en concurrence, pour respecter la réglementation. M. Gallet avait avoué n’avoir «jamais été confronté à ces questions de marchés publics», un domaine qui lui «était totalement inconnu». Il avait rejeté la faute sur «les équipes en place à l’INA», qui ne lui ont pas transmis de «signaux d’alerte» sur la nécessité d’un appel d’offres. La procureure, Amélie Cladière, avait estimé que M. Pingaud servait de «coach personnel» à M. Gallet, financé «avec de l’argent public», notamment pour lancer sa candidature à la direction de Radio France. Un scénario «au minimum insultant, au pire diffamatoire», avait rétorqué M. Gallet, en détaillant les missions de son conseiller: écrire des discours, accompagner plusieurs projets de l’INA, dont la refonte du site internet, … Second volet de l’affaire, un contrat de 2013 entre l’INA et la société de conseil Roland Berger Strategy, pour 289.000 euros hors taxes. L’entreprise avait été choisie après un appel d’offres «trop court» et M. Gallet avait faussé la concurrence en prévenant ce prestataire dès 2010 que l’INA aurait besoin de fusionner 2 directions, selon la procureure. Ses avocats défendent, eux, la régularité de cette procédure: les sociétés avaient 5 jours pour envoyer leur «fiche d’identité» à l’INA, mais disposaient de plusieurs semaines pour formuler une véritable offre commerciale.