Le film sud-coréen «Parasite» est entré dimanche dans la légende des Oscars

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Le film «Parasite» du réalisateur sud-coréen Bong Joon-ho est entré dimanche dans la légende des Oscars en devenant le premier long-métrage en langue étrangère à obtenir le prix du «meilleur film», récompense phare d’Hollywood. «On dirait qu’un moment très important dans l’histoire est en train de se jouer», s’est exclamée sur scène la productrice du film, Kwak Sin-ae, applaudie par le gratin de l’industrie du cinéma. «Parasite» a déjoué de façon fracassante les pronostics qui voyaient un couronnement pour «1917», du Britannique Sam Mendes. Signe de l’engouement des professionnels, le film a aussi reçu l’Oscar du meilleur scénario original, tandis que Bong Joon-ho a été sacré «meilleur réalisateur». Mélange de thriller, de comédie familiale déjantée et de satire sur les inégalités sociales, il a également été primé dans la catégorie du «meilleur film international», auparavant baptisée «meilleur film en langue étrangère». «Je suis très heureux d’être le premier lauréat sous cette nouvelle appellation. J’applaudis et je soutiens la nouvelle orientation que ce changement de nom symbolise», a déclaré le réalisateur, qui s’exprimait en coréen via une interprète. En recevant son Golden Globe le mois dernier, Bong Joon-ho avait lancé avec humour aux professionnels réunis pour l’occasion: «Quand vous aurez surmonté la barrière des deux centimètres de sous-titres, vous découvrirez des films étonnants». L’Académie des Oscars, vivement critiquée pour le manque de diversité dans ses choix, a manifestement entendu le réalisateur sud-coréen, qui avait déjà reçu la Palme d’or au festival de Cannes l’an dernier. Donné comme le grand favori de cette 92e édition, «1917», film sur l’équipée de deux jeunes soldats dans les tranchées de la Première Guerre mondiale, construit comme un plan séquence long de deux heures, doit se contenter de trois prix: l’Oscar de la meilleure photographie pour Roger Deakins, et deux autres dans des catégories techniques (son et effets spéciaux). Vive déception également pour le très respecté Martin Scorsese dont le thriller politico-mafieux produit par Netflix, «The Irishman», repart bredouille malgré dix nominations, parmi lesquelles Al Pacino et Joe Pesci, sans oublier le réalisateur lui-même. Martin Scorsese a tout de même reçu un hommage appuyé et émouvant de Bong Joon-ho, rappelant comment il avait «étudié ses films à l’école». Maigre moisson enfin pour Quentin Tarantino, qui jouait pourtant à domicile avec «Once Upon a Time… in Hollywood», ode à son enfance à Los Angeles et au cinéma. Le film repart avec seulement deux Oscars au total, dont un à Brad Pitt en tant que second rôle aux côtés de Leonardi DiCaprio. Si «Parasite» a créé la surprise, l’Académie a privilégié les grands favoris du côté des comédiens. C’est Joaquin Phoenix qui a été désigné meilleur acteur pour son rôle choc de «Joker» sombrant dans la folie et le meurtre, tandis que Renée Zellweger a reçu comme prévu la statuette dorée dans la catégorie meilleure actrice pour son incarnation de Judy Garland dans «Judy». Très ému, Joaquin Phoenix, végétarien et militant écologiste de longue date, a une nouvelle fois consacré une partie de son discours à regretter une «vision du monde égocentrique» qui aboutit à la destruction de l’environnement. Plus prosaïque mais tout aussi larmoyante, Renée Zellweger a quant à elle dédié sa statuette à Judy Garland qui «n’a jamais reçu cet honneur de son vivant». L’Américaine Laura Dern a enfin été primée pour son rôle d’avocate impitoyable dans le divorce tumultueux mis en scène par «Marriage Story», le cadeau rêvé à la veille de son 53e anniversaire. Le triomphe de «Parasite» fera peut-être oublier les vives critiques adressées à l’Académie des Oscars pour le manque de diversité ethnique et culturelle dans sa sélection, un reproche récurrent.