Le téléfilm séduit toujours les Français

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Format à part, le téléfilm de 90’ séduit toujours les Français qui voient en lui un film à la télévision, alors même que sa durée le rend difficilement exportable contrairement aux séries, constatent les professionnels réunis au festival de fiction TV de La Rochelle. 

«Un film de cinéma fabriqué pour la télévision», c’est ainsi que Thomas Anargyros, président de l’Union syndicale de la production audiovisuelle (Upsa), et producteur chez Europacorp, définit le téléfilm ou «unitaire de 90’», comme ont dit dans le secteur. Construit comme une entité à part, racontant une histoire en 90’, le téléfilm n’est pas destiné aux salles obscures, même si sa durée le rapproche davantage du long-métrage que les 26 ou 52’ traditionnelles des séries. «Le 52’, c’est le format international», rappelle Quentin Raspail, soulignant la grande qualité des téléfilms français et rappelant que «l’Allemagne en produit beaucoup également». En 2013, sur TF1, France 2, France 3, Canal+, M6 et Arte, les téléfilms ont représenté 28,4% des soirées de fiction, soit 242 soirées, contre 70,5% de 52’, selon le Centre national du cinéma (CNC). Mais au sein de l’offre de fiction strictement française, les fictions de 90’ sont majoritaires en nombre de soirées (54,4% de l’offre en 2013), alors que les fictions de 52’ constituent la majorité de l’offre étrangère (87,1% de l’offre). Pour Thierry Sorel, directeur des programmes de fiction à France 2,» il y a une tradition de l’unitaire en France, même s’il y en a de moins en moins, il y en a toujours sur le service public». «Ça correspond à l’appétit du public et c’est une manière pour nous de travailler des sujets qui ne méritent pas forcément une série, mais qu’on a à coeur de traiter», poursuit-il. Chronique, polar, thriller, épisode historique, faits de société, faits divers, le téléfilm se prête à différents styles, que d’autres formats ne supporteraient pas. Même si la série peut aller jusqu’à l’exportation et participer au rayonnement d’une chaîne, le responsable de la fiction à France 2 dit tenir aux téléfilms: sinon, «il y a beaucoup de films qu’on ne pourrait pas faire : un biopic sur Arletty, c’est en 90’. «La loi», sur le combat de Simone Weil à l’Assemblée, c’est un téléfilm». 

Pour Laurence Bachman, directrice générale adjointe de la société de production Telfrance, «la narration y est plus simple, plus linéaire : ça permet de faire des beaux sujets, un peu évènementiels, qui touchent, avec du débat derrière». «C’est dans l’ADN de la France, de la «Nouvelle Vague», ça fait 40 ans qu’on en fait», continue-t-elle. 

Un genre, cependant, relève du défi dans un format aussi long, selon la productrice : «les comédies de 90’, c’est bien de temps en temps, mais il y a toujours 10 ou 15’ où on s’emmerde. Tenir une comédie en 90’, c’est dur!». Et si le téléfilm coûte plus cher rapporté à la minute qu’une série, il engage moins sur le moyen terme: «un unitaire fait prendre moins de risques qu’une série : ça marche, tant mieux, ça marche pas, tant pis», indique-t-elle. Lorsque le succès est au rendez-vous, certains peuvent même être projetés au cinéma, comme ce fût le cas pour «Le péril jeune», «La journée de la jupe» ou encore «La belle personne».