Plateformes numériques: une mission sénatoriale s’inquiète du «rôle prépondérant joué par le «management algorithmique»

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Une mission d’information du Sénat sur «l’Ubérisation de la société», dont le rapport a été dévoilé mercredi, s’inquiète du «rôle prépondérant joué par le «management algorithmique» pour les travailleurs des plateformes et préconise son encadrement, ainsi qu’une plus grande transparence de ces outils. «Il ne s’agit pas d’un outil neutre», a insisté Pascal Savoldelli, sénateur PCF et rapporteur de la mission. «Il constitue un outil que nous considérons comme politique, avec tous les biais que cela comporte, notamment en termes de discrimination», a-t-il ajouté lors de la présentation du rapport. «Les algorithmes de tarification, les mécanismes d’incitation et les systèmes de notation ont des effets directs sur le comportement des travailleurs», est-il écrit dans le rapport. Avec l’absence de relation sociale dans le travail induite par ces algorithmes, «on risque de créer une société de serviteurs et de servitude», s’est inquiété Pascal Savoldelli. La mission, présidée par la sénatrice LR Martine Berthet, formule 18 recommandations pour encadrer ce management algorithmique mais aussi améliorer les conditions de travail des travailleurs et favoriser le dialogue social. Parmi les idées avancées, permettre aux représentants élus d’accéder à un document expliquant clairement et simplement le fonctionnement de l’algorithme auquel lui et ses collègues sont soumis. La mission recommande aussi d’imposer l’effacement régulier des notes attribuées par les clients aux travailleurs. Le contenu de l’algorithme doit être «objet de négociation et permettre que ces problématiques intègrent le dialogue social», précise la mission. «Cette mission d’information a acquis la conviction que le management algorithmique contribue à déterminer les conditions de travail et de rémunération des travailleurs», affirme-t-elle. 

Autre sujet majeur, la question des tarifs et de la rémunération. «Elle doit rentrer dans le champ du dialogue social», recommande Pascal Savoldelli. Car actuellement, «le cadre du dialogue social est incomplet», déplore la mission. Il ne doit par exemple pas porter une «atteinte disproportionnée à la liberté contractuelle et à la liberté d’entreprendre», a rappelé le Conseil d’État, limitant ainsi la participation des travailleurs. Mardi, l’Assemblée nationale a ratifié une ordonnance du gouvernement pour organiser début 2022 des élections professionnelles pour les VTC et livreurs indépendants. «Le débat va se poursuivre au Sénat», a assuré M. Savoldelli car «il est inconcevable qu’il y ait un dialogue social qui contourne la question du prix et de la rémunération». «La fragilité de la protection sociale, l’absence de perspectives professionnelles et les risques physiques et psycho-sociaux subis par ces travailleurs produisent des conséquences terribles», s’inquiète en outre la mission.