R. RAVANAS (RTL) : «On ne veut surtout pas que RTL devienne une radio d’opinion»

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RTL fait évoluer sa grille. Dans un contexte médiatique de plus en plus polarisé, la radio privée du Groupe M6 veut trouver un équilibre entre tradition et innovation, tout en affirmant ne pas vouloir devenir une radio d’opinion. Tour d’horizon de la stratégie avec Régis RAVANAS, Directeur général des activités audio du Groupe M6.

MEDIA +
Comment avez-vous envisagé l’évolution de la grille des programmes de RTL pour répondre aux nouvelles attentes des auditeurs ?
RÉGIS RAVANAS

La notion de «vivre ensemble» – qui est notre slogan depuis des années – est devenu un mantra pour les Français depuis les JO. Cela nous a amenés à réfléchir à la manière dont nous pouvions, à notre niveau, contribuer à prolonger cet esprit. Nous avons conclu que c’était en expliquant davantage le monde, devenu aujourd’hui très complexe. Quand on observe la situation politique depuis la dissolution, l’état des finances publiques, la situation internationale avec la guerre à seulement deux heures de Paris, il devient crucial de mieux comprendre et d’analyser le monde. C’est pourquoi RTL a ajouté six heures supplémentaires d’information à sa programmation, ce qui est un changement significatif pour une station comme la nôtre. Nous proposons une nouvelle dynamique de rentrée portée par une pléiade de nouveaux talents : Thomas Sotto, Etienne Gernelle, Isabelle Saporta, Faustine Bollaert, qui viennent parfaitement compléter les talents déjà présents : Yves Calvi, Philippe Caverivière, Eric Brunet, Julien Courbet, Jimmy Mohamed, Laurent Ruquier, Lorànt Deutsch, Mohamed Bouhafsi, Jean Alphonse Richard…

MEDIA +
A l’heure où les médias se polarisent, comment se positionne RTL ?
RÉGIS RAVANAS

Il y a six mois, nous avons commandé un sondage Ifop sur le pluralisme. Il en ressort que RTL est perçue par les Français comme une radio généraliste particulièrement équilibrée dans son traitement de l’information, notamment en comparaison de ses concurrentes. Le monde des médias évolue et se polarise. Parallèlement, l’influence croissante des réseaux sociaux, où se mêlent informations vérifiées et fake news, rend la situation plus confuse. C’est là que RTL a un rôle à jouer, car son ADN repose sur le pluralisme. On ne veut surtout pas qu’elle devienne une radio d’opinion…

MEDIA +
Même si vous prônez la liberté d’expression à travers votre campagne ?
RÉGIS RAVANAS

La liberté c’est justement la possibilité de pouvoir s’exprimer sans subir l’influence d’un actionnaire, d’un lobby ou de qui que ce soit. Dans ce contexte de polarisation, RTL se positionne comme la voix pluraliste, avec une neutralité qui nous est propre. Expliquer le monde ne se limite pas à l’information. C’est pourquoi nous avons lancé l’émission «Entrez dans l’histoire» à 15h, animée par Lorànt Deutsch. Ce rendez-vous, axé sur la connaissance, est déjà l’un des premiers podcasts en France.

MEDIA +
Et la place de l’humour en radio dans une société aussi fragmentée ?
RÉGIS RAVANAS

Pour expliquer le monde, il faut savoir s’en extraire. C’est ainsi qu’intervient l’humour avec cinq séquences dans la matinale : la minute des «Grosses Têtes», Laurent Gerra, Philippe Caverivière à deux reprises et Alex Vizorek. Nous avons choisi de placer ces deux dernières chroniques juste après les interviews, car elles prennent plus de pertinence en s’inspirant des sujets abordés. Cette année marque aussi les dix ans de Laurent Ruquier à la tête des «Grosses Têtes». Ce sera l’occasion d’épisodes spéciaux, de délocalisations et l’arrivée de grands talents comme Thomas VDB et Arnaud Ducret.

MEDIA +
Les délocalisations en radio, ça sert vraiment à quelque chose ?
RÉGIS RAVANAS

Les délocalisations ont trois objectifs. D’abord, aller à la rencontre de nos auditeurs. Nous leur accordons beaucoup d’importance et voulons qu’ils sachent que RTL est une station proche d’eux. Ensuite, grâce à la présence du public, ces déplacements permettent de créer des programmes de qualité, parfois même disruptifs. Par exemple, une émission comme «Ça peut vous arriver» avec Julien Courbet, réalisée devant un public enthousiaste au Mans, a créé une ambiance complètement différente. Enfin, cela nous permet d’événementialiser la grille et de communiquer tout autour.

MEDIA +
RTL a une longue histoire et un fort héritage. Comment conjuguez-vous cette tradition avec l’innovation pour attirer des publics plus jeunes tout en fidélisant les auditeurs historiques ?
RÉGIS RAVANAS

Il existe différents leviers. La fidélisation repose d’abord sur des rendez-vous forts, bien incarnés, et une grille claire. Nous veillons à avoir des rendez-vous à des heures fixes (plutôt 14h que 14h30, par exemple). Un autre point crucial est la continuité, avec des personnalités marquantes sur chaque tranche horaire. Chacune de nos émissions a des promesses simples : Julien Courbet résout vos problèmes, Faustine Bollaert raconte les destins extraordinaires de gens ordinaires… La clarté de la grille aide à fidéliser l’audience. Pour attirer de nouveaux auditeurs, la communication est essentielle, mais aussi des personnalités qui séduisent un public plus jeune, comme Philippe Caverivière. Nous misons également sur les développements digitaux. RTL est ainsi la radio privée leader en production de podcasts et en même temps première radio généraliste sur TikTok.

MEDIA +
RTL doit composer avec l’essor des podcasts et des plateformes de streaming. Comment adaptez-vous l’offre pour rester pertinent face à ces nouvelles formes de consommation de l’information et du divertissement ?
RÉGIS RAVANAS

Quand nous construisons une antenne, elle doit être aussi au service du digital. Par exemple, lorsque nous intégrons «Entrez dans l’histoire» dans la grille, nous savions qu’elle fonctionnait déjà très bien en format podcast. Les chroniques sont aussi conçues pour être consommées rapidement, en format «snacking», et pour bien circuler en ligne. Nous repensons la grille de manière différente lorsque nous cherchons à être performants sur le digital. L’arrivée de Faustine Bollaert et de Lorànt Deutsch en quotidienne illustre bien cette double ambition : renforcer à la fois la grille linéaire et l’offre en podcast.