Sylvie-Pierre BROSSOLETTE (CSA) : «La télévision doit absolument refléter autre chose que cette inégalité et infériorité des femmes»

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Sylvie-Pierre BROSSOLETTE, Membre du CSA

Pour la première fois, les chaînes de télévision et de radio ont remis au Conseil supérieur de l’audiovisuel les indicateurs qualitatifs et quantitatifs sur la représentation des femmes et des hommes dans leurs programmes. Les détails avec Sylvie-Pierre BROSSOLETTE, Membre du CSA.

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Selon le rapport révélé hier par le CSA, les femmes sont toujours moins représentées que les hommes dans les chaînes de télévision et les radios. Est-ce alarmant ?

Sylvie-Pierre BROSSOLETTE

C’est préoccupant ! C’est d’ailleurs la raison pour laquelle une loi relative au respect des droits des femmes a été votée définitivement le 4 août 2014. L’adoption de la délibération en février 2015 prévoyait que les chaînes et les radios s’autoévaluent quant à la présence des femmes sur leurs antennes, tant d’un point de vue quantitatif que qualitatif. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel a pour mission de veiller d’une part, à une juste représentation des femmes et des hommes dans les programmes des services de communication audiovisuelle et d’autre part, à l’image des femmes qui apparaît dans ces programmes notamment en luttant contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes, les violences faites aux femmes et les violences commises au sein du couple. Cette prise de position est importante. Si on ne faisait rien, l’image potentiellement inférieure des femmes allait continuer à produire son effet de miroir sur les jeunes esprits et les autres. La télévision doit absolument refléter autre chose que cette inégalité et infériorité des femmes.

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10 chaînes de télévision sur 26 (5 du groupe France Télévisions et 5 chaînes privées)  déclarent une proportion de «présentatrices et animatrices» presque égale à celle de leurs équivalents masculins. Le signal est-il positif ?

Sylvie-Pierre BROSSOLETTE

Oui, il y a eu un progrès autour des présentateurs et des journalistes. Quantitativement, il y a beaucoup plus de femmes animatrices qu’il y a 20 ans. En revanche, le rapport homme-femme est beaucoup plus déséquilibré sur les experts, les invités politiques ainsi que les autres intervenants dans tous domaines. Sur les chaînes d’information par exemple, la proportion des femmes dans ces catégories ne dépasse pas 30% en moyenne.

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Qu’en est-il des programmes contribuant à la lutte contre les préjugés sexistes ?

Sylvie-Pierre BROSSOLETTE

La loi demande aux chaînes de diffuser des programmes consacrés à la lutte contre les préjugés sexistes et violences faites aux femmes. La plupart des diffuseurs en ont déclaré un assez grand nombre (433 programmes) sur des thèmes variés. Là-dessus, je suis plutôt satisfaite même s’il faut que chaque année il y en ait davantage. Les diffuseurs devaient également déclarer les programmes non stéréotypés. Ce sont essentiellement des fictions, des animations et quelques téléréalités. Là-dessus, nous avons retoqué 82 programmes qui ne pouvaient pas être valorisés au titre des programmes non stéréotypés.

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Le stéréotype a-t-il la dent dure dans l’audiovisuel en 2016 ?

Sylvie-Pierre BROSSOLETTE

Bien sûr ! Les chaînes de télévision qui proposent par exemple des programmes de téléréalité ont une proportion de femmes à l’antenne plus importante que les autres, mais les stéréotypes sont bien présents. On vient parfois chercher les candidates pour leur qualité physique ou de séduction, et moins pour leur intellect.

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Constatez-vous un changement de posture des chaînes et radios sur le sujet ?

Sylvie-Pierre BROSSOLETTE

Oui, bien entendu ! Il y a une sorte d’émulation qui se met doucement en place. Mais le CSA souhaite que les efforts se poursuivent.