Telecom Italia opte pour l’offre du fonds KKR

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Après des mois de suspense, Telecom Italia (TIM) a opté jeudi pour l’offre du fonds d’investissement américain KKR en vue du rachat de son réseau fixe, prenant ainsi le contrepied de son 1er actionnaire, Vivendi. Le CA de TIM a décidé «à l’unanimité» de donner mandat au PDG Pietro Labriola pour entamer des négociations «exclusives» avec KKR, dont l’offre a été jugée plus avantageuse que celle de la Caisse des dépôts italienne (CDP). La date butoir pour le dépôt d’une «offre finale» de KKR a été fixée au 30 septembre, mais Telecom Italia a bon espoir de conclure un accord avant, a indiqué une source proche du dossier. Vivendi, qui détient 23,75% de Telecom Italia, n’est plus représenté au sein de son CA depuis qu’Arnaud de Puyfontaine, son président du directoire, a claqué la porte de cette instance en janvier. KKR avait relevé début juin son offre de 2 milliards d’euros, la faisant passer à 23 milliards d’euros, creusant ainsi l’écart avec celle de la CDP qui tournait autour de 19,3 milliards d’euros. Ces offres sont restées très éloignées des attentes de Vivendi, qui avait réclamé 31 milliards d’euros et était favorable à un arrêt net des négociations. L’offre de KKR était mieux placée que celle de la CDP, en raison du montant plus élevé et d’une possible alliance avec le fonds italien d’infrastructures F2i qui pourrait permettre de faire monter les enchères, avait commenté avant la réunion une source proche du dossier. En outre, le plan de la CDP, associée au fonds d’investissement australien Macquarie, prévoyait la fusion du réseau de TIM avec celui de son concurrent Open Fiber. Or, la CDP et Macquarie en détiennent respectivement 60% et 40%. D’où des inquiétudes sur la réaction des autorités européennes de la concurrence, qui pourraient épingler une éventuelle situation de monopole du futur ensemble en Italie et réclamer à la CDP des cessions d’actifs. Une source proche de Vivendi avait annoncé la couleur en estimant il y a une dizaine de jours que «la saison des offres» pour le réseau de Telecom Italia devrait toucher à sa fin, ajoutant que le conseil d’administration du groupe italien devrait rejeter ces nouvelles propositions. «La rhétorique selon laquelle TIM doit vendre le réseau pour survivre doit être fermement réfutée, car il existe d’autres plans qui permettent d’atteindre le même objectif avec un effort économique moindre», a-t-elle ajouté, sans en préciser la nature. Une attitude qui a apparemment fortement déplu au gouvernement italien, actionnaire à hauteur de 9,8% de l’opérateur historique à travers la CDP, qui soutient le plan stratégique de M. Labriola prévoyant la scission entre le réseau et les activités de services.    A tel point que le gouvernement nationaliste dirigé par Giorgia Meloni «a jugé bon d’envoyer un signal clair aux Français» en appuyant la candidature d’Alessandro Pansa comme nouveau membre du CA de TIM, écartant celle proposée par Vivendi, a rapporté le quotidien la Repubblica. Telecom Italia a désigné il y a une semaine M. Pansa, président de sa filiale Sparkle, comme nouvel administrateur, prenant le contrepied de Vivendi qui avait soutenu Luciano Carta, ancien président du groupe d’armement Leonardo. Interrogée sur Vivendi par la presse italienne à l’issue de sa rencontre avec Emmanuel Macron à Paris, Giorgia Meloni a répondu que le sujet «n’a pas fait l’objet du débat» mercredi, sans exclure d’en parler à une autre occasion avec le président français. L’objectif principal de M. Labriola, nommé au poste de PDG en janvier 2022 avec le soutien de Vivendi, est de diminuer la lourde dette de Telecom Italia qui s’élève à 25,8 milliards d’euros. Une 1ère tentative de KKR de prendre le contrôle de la totalité de TIM avait échoué en avril 2022, se heurtant, là aussi, au refus de Vivendi qui avait jugé son offre trop basse. Le fonds, qui avait alors proposé 10,8 milliards d’euros, est déjà actionnaire à hauteur de 37,5% de FiberCop, l’opérateur d’une partie du réseau de Telecom Italia.