40 propositions pour une nouvelle régulation de l’audiovisuel à l’ère numérique

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Renforcer la lutte contre le piratage, encadrer davantage les plates-formes type Netflix et Amazon ou supprimer la publicité sur Radio France et France 5: des députés ont publié jeudi 40 propositions pour la réforme de l’audiovisuel, que la ministre de la Culture souhaite présenter fin mars 2019. Ces propositions sont issues d’une mission d’information «sur une nouvelle régulation de la communication audiovisuelle à l’ère numérique», menée depuis février par les députés de la Commission des affaires culturelles, qui ont rencontré dans ce cadre plus de 200 acteurs du secteur. Elles devraient servir de base au projet de loi de Françoise Nyssen. «Ce rapport est un éclairage utile et un atout précieux pour la transformation de l’audiovisuel à venir», a réagi jeudi la ministre. «La révolution numérique et les acteurs qui ont émergé ne sont pas une menace en soi, ils en représentent une dès lors qu’ils ne jouent pas le jeu», a-t-elle poursuivi, soulignant le «contexte d’urgence» de la réforme de ce secteur «au poids économique considérable», et qui emploie 240.000 personnes en France. La loi sera divisée en 4 chapitres, a détaillé Mme Nyssen: le renforcement de l’audiovisuel public, mieux financer et exposer la création (avec la transposition de la directive européenne SMA, qui impose notamment aux plates-formes américaines un quota de diffusion de 30% d’oeuvres européennes), la garantie du pluralisme et la protection du public étendue aux plates-formes de vidéos, et enfin l’assouplissement et la modernisation de la réglementation.Concerne les relations entre producteurs et diffuseurs, «le point d’équilibre n’a pas été atteint», a jugé la ministre. «Je souhaite que dans les prochaines semaines un accord soit trouvé sinon l’État prendra ses responsabilités», a-t-elle ajouté. Dans le rapport parlementaire, l’audiovisuel public a été volontairement laissé de côté, notamment pour ne pas «cannibaliser» le débat, a précisé la députée LREM Aurore Bergé, rapporteur de la mission d’information. Pierre-Yves Bournazel, président de la mission d’information et député Agir, a regretté cette omission et a tenu à évoquer l’audiovisuel public, notamment sur le mode de nomination des dirigeants et sur le rétablissement «transitoire» de la publicité entre 20 et 21h00 sur France 2, qui pourrait générer selon lui 60 millions d’euros. Aurore Bergé s’est dite personnellement opposée à cette mesure. Le rapport propose de son côté d’«autoriser la publicité segmentée et géolocalisée à la tv dans le cadre d’une expérimentation de 18 mois» et aussi d’«universaliser l’assiette de la contribution à l’audiovisuel par foyer». Ce changement d’assiette de la redevance permettrait de «supprimer la publicité sur Radio France – y compris sur ses espaces numériques – et sur France 5». «L’idée n’est pas d’affaiblir l’audiovisuel public, mais d’aider à mieux le singulariser», assure Aurore Bergé, qui estime à 100 millions d’euros les recettes de la redevance élargie, qui seraient affectées à Radio France et France 5 en compensation de l’arrêt de la publicité sur leurs antennes. En matière de piratage, le rapport rappelle que seules 88 sanctions pécuniaires ont été prononcées en 2017, dont une seule amende d’au moins 2.000 euros. Pour y remédier, les députés suggèrent de doter la Hadopi (Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet) d’un pouvoir de transaction pénale, c’est-à-dire «une base juridique qui permet d’aller beaucoup plus vite», selon Aurore Bergé. Autre proposition: une fusion de la Hadopi et du CSA «pour créer une autorité unique de régulation des contenus audiovisuels». L’accent est aussi mis sur la parité, avec l’objectif de «rendre paritaire la composition des commissions spécialisées du CNC» ou le renforcement des obligations de France TV, «notamment en ce qui concerne les réalisateurs auxquels le groupe fait appel».