Atos: semaine décisive face à Kretinsky

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Réunion de la «dernière chance» pour éviter une panique financière: la direction du groupe informatique français Atos, en pleine déconfiture, doit rencontrer cette semaine Daniel Kretinsky, pour faire avancer la cession d’une partie de ses activités et rassurer ses créanciers, selon des informations de presse. Ce rendez-vous n’a été confirmé ni par Atos ni par l’entourage du milliardaire tchèque, avec lequel les négociations patinent depuis plusieurs mois. Si Atos n’a pas évoqué de date butoir pour une éventuelle fin des négociations avec EPEI, la société d’investissement de M. Kretinsky, l’entreprise française a indiqué à ses salariés qu’une décision finale serait communiquée «avant la fin du mois», a rapporté une source syndicale. L’enjeu pour Atos, qui compte près de 110.000 salariés dans le monde, est de taille: confronté à un mur de dette avec 3,65 milliards d’euros d’emprunts et d’obligations à rembourser ou refinancer avant fin 2025, il doit parvenir à un accord pour céder Tech Foundations, l’entité qui regroupe ses activités historiques d’infogérance, et retrouver un peu d’air. Annoncé à l’été 2023, l’accord en discussion avec EPEI peine à se concrétiser et le groupe français a encore prévenu début janvier n’avoir «aucune certitude» sur l’issue des discussions. En attendant, sa valorisation a largement fondu – le prix de l’action Atos est passé de 75 euros début 2021 à quelque 3,77 euros désormais – et la menace d’un échec de ces négociations a poussé vendredi l’agence de notation S&P à dégrader sa note financière. Si Atos «négocie avec des banques» pour refinancer sa dette, en particulier son prêt à terme de 1,5 milliard d’euros, au-delà de janvier 2025, «l’incertitude» croissante concernant les discussions autour de Tech Foundations «pourrait compliquer davantage [ces] négociations», a prévenu l’agence dans sa note. Une source proche d’Atos a toutefois voulu tempérer cette dégradation, assurant y voir «une certaine logique». «Ce qui transparait c’est que S&P serait enclin à réévaluer la note en cas de levée des incertitudes», a-t-elle fait valoir. Face au spectre d’une faillite, Atos a récemment réfuté avoir demandé la désignation d’un mandataire judiciaire ou l’ouverture d’une procédure de conciliation, comme évoqué par la presse. Une réunion s’est toutefois tenue mi-janvier auprès du Comité interministériel de restructuration industrielle, l’organe de Bercy en charge de l’accompagnement des entreprises en difficulté, a confirmé une source proche du dossier. «Les salariés et les élus sont très inquiets», souffle un représentant syndical du groupe. Les tractations menées avec Daniel Kretinsky étant «exclusives», l’entreprise n’a pas pu mener de négociations avec d’autres potentiels repreneurs pour Tech Foundations. «Si l’opération avec EPEI n’a pas lieu, le groupe devra accéder aux marchés de capitaux (dettes et actions) et/ou envisager la vente d’actifs supplémentaires, afin d’assurer une liquidité adéquate pour faire face aux échéances de la dette en 2025», a déjà averti Atos. En parallèle, des négociations avec Airbus pour le rachat des activités Big Data & Security de l’entreprise, annoncées début janvier, se poursuivent, pour une valeur d’entreprise comprise entre 1,5 et 1,8 milliard d’euros. Cette vente «prendrait du temps à réaliser, tout comme la vente potentielle d’autres actifs. Cela limiterait la capacité de l’entreprise à utiliser le produit de la vente pour faire face aux liquidités à court terme», anticipe toutefois l’agence de notation S&P. Face à une crise amorcée depuis plusieurs années, les difficultés économiques traversées par Atos se sont aussi accompagnées de remous au sein de sa gouvernance. Après trois mois en poste, le directeur général de l’entreprise a récemment été remplacé par l’Américain Paul Saleh. Et en octobre, le président du groupe, Bertrand Meunier, avait déjà dû céder sa place face aux critiques visant son projet consistant à scinder Atos en deux branches distinctes.