Bienvenue chez T1, pépinière sud-coréenne de champions de l’esport

258

Une salle d’entraînement sponsorisée par Nike, des nutritionnistes, des cours d’anglais… Bienvenue chez T1, pépinière sud-coréenne de champions de l’esport où tous rêvent d’imiter le champion de l’écurie: Faker, la légende de League of Legends. Conséquence de la croissance de l’engouement pour les compétitions de jeux vidéo, les stars de la discipline drainent un public de plus en plus nombreux, et suscitent l’intérêt toujours plus grand des sponsors et annonceurs. La Corée du Sud est une des principales puissances mondiales de l’esport. Un bâtiment de dix étages flambant neuf du quartier chic de Gangnam, à Séoul, abrite le repaire de l’écurie T1, où s’entraînent des dizaines de joueurs professionnels d’une vingtaine d’années ou moins, observant une discipline qui rappelle celle des sportifs traditionnels. «Nous avons une salle de sport, une cafétéria, des cuisiniers… Tout ce dont ces jeunes joueurs ont besoin pour exceller», détaille John Kim, le directeur général de T1. Le quotidien est intense pour les heureux élus, avec une dizaine d’heures avec entraîneurs et préparateurs qui affinent compétences et stratégie en vue du prochain match.Sur les photos promotionnelles, les sportifs posent avec le maillot de de l’équipe. La moitié portent des lunettes, et la plupart la même coupe au bol. Pour Choi Ellim, qui fait depuis 2019 partie de l’équipe première de T1 avec Lee «Faker» Sang-hyeok, la vie a bien changé depuis l’époque où il jouait aux jeux vidéo chez lui, pour le plaisir. «Quand c’était un loisir, je pouvais manger quand j’avais faim, dormir quand j’avais sommeil. Mais maintenant, notre emploi du temps est minuté», dit-il. Parmi les obligations, il y a aussi celle de passer un minimum d’heures par mois à interragir avec leur cohorte de fans sur les réseaux sociaux comme Twitch ou YouTube. T1 n’a rien à démontrer puisque l’écurie est 3 fois championne du monde de League of Legends (LoL), le jeu le plus populaire, et, selon esportsearnings.com, elle est en tête pour ce qui est des prix raflés, estimés à 7,1 millions de dollars (environ 6 millions d’euros). La société a été fondée en 2004 par le géant sud-coréen des télécoms SK Telecom, et est gérée depuis deux ans par une coentreprise avec Comcast Spectacor, elle-même filiale du géant américain Comcast, lequel possède aussi l’équipe de hockey sur glace des Philadelphia Flyers. Le mois dernier SK Telecom a vendu l’équipe professionnelle de baseball des Wyverns, basée à Incheon, pour 122 millions de dollars avec le projet de concentrer ses investissements sur les «sports futuristes». L’audience de l’esport est une de celles qui connaissent la croissance la plus forte. Plus de 100 millions de fans s’étaient connectés en 2019 pour suivre les championnats du monde de LoL. Le secteur de l’esport devrait générer un chiffre d’affaires de plus d’un milliard de dollars cette année, en hausse de 15% par rapport à 2020, selon des chiffres de la société Newzoo. Environ 60% proviendra du sponsoring. Nike, BMW et Red Bull font partie des sponsors de T1 et les derniers championnats du monde de LoL étaient soutenus par des marques prestigieuses comme Louis Vuitton et Mercedes-Benz. L’an prochain, l’esport figurera parmi les épreuves des Jeux asiatiques en Chine. Il a cependant essuyé un revers quand le Comité international olympique s’est refusé à reconnaître une instance mondiale de la discipline. Pour John Kim, l’esport est aussi compétitif que n’importe quel sport traditionnel, et Faker, «le plus grand de tous les temps», peut à 24 ans être comparé à Michael Jordan ou Tiger Woods. «Il y a 100 millions de personnes qui jouent chaque mois à League of Legends et pour passer pro, il faut être meilleur qu’eux, appartenir à l’élite de l’élite», dit John Kim. «Pour intégrer T1, il faut être encore au-dessus».