Google: des milliers d’employés manifestent à travers le monde

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De Singapour à New York, en passant par Londres et même au siège mondial en Californie, des milliers d’employés de Google ont observé jeudi dernier un arrêt de travail pour dénoncer la gestion du harcèlement sexuel au sein de l’entreprise. Ce mouvement social, le 1er de cette ampleur au sein de cette entreprise symbole de modernité, est parti d’un article du «New York Times»: le quotidien affirmait que Google avait couvert ces dernières années une série de cas de harcèlements sexuels impliquant des hauts responsables, dont Andy Rubin, créateur du système d’exploitation mobile Android, parti du groupe en 2014 avec une indemnité de 90 millions de dollars. M. Rubin a nié ces allégations. Les organisateurs du mouvement avaient appelé les quelque 90.000 employés de Google dans le monde à sortir de leurs bureaux à 11h00 du matin, dans leur fuseau horaire respectif. Au siège social du groupe, à Mountain View (Californie), des images diffusées par des salariés sur Twitter et par des télévisons locales montraient des milliers de salariés – surnommés «Googlers» – rassemblés entre les nombreux bâtiments du campus, le «Googleplex», en pleine Silicon Valley, le berceau des géants technologiques. Des centaines d’employés de sa filiale YouTube se sont aussi mobilisés. «Douze ans chez Google et je n’ai jamais vu une foule aussi nombreuse. Fier d’être là pour soutenir la justice et la transparence», a tweeté Ken Norton, un salarié. Le PDG Sundar Pichai a fait savoir dans une déclaration écrite qu’il soutenait les employés qui choisissaient de débrayer. S’exprimant jeudi soir lors d’une conférence organisée par le NYT à New York, il a reconnu qu’il y avait «de la colère et de la frustration au sein du groupe». «Chez Google, nous mettons la barre très haut et nous n’avons clairement pas répondu à nos propres attentes», a-t-il dit, a rapporté le journal. Selon lui, Google a «adopté une position très stricte» concernant les comportements inadéquats ces dernières années mais «des moments comme celui-ci montrent que nous ne l’avons pas toujours fait correctement». «Des actions concrètes approchent», a-t-il ajouté. Les rassemblements avaient démarré en Asie, à Singapour où une centaine d’employés s’étaient regroupés en interne, puis à Tokyo, également en interne, et à Hyderabad, en Inde. Le mouvement a ensuite gagné l’Europe. Environ 500 employés se sont rassemblés dans un espace extérieur du siège européen de Google à Dublin. Et à Londres, des centaines d’autres se sont réunis dans une grande salle de l’entreprise avant de sortir dans la rue. D’autres rassemblements ont été organisés à Berlin et Zurich. A New York, où Google emploie près de 10.000 personnes, des centaines d’employés, pour la plupart âgés de moins de 40 ans, se sont retrouvés dans un parc proche des bureaux de l’entreprise dans le quartier de Chelsea. Certains étaient munis de pancartes affirmant que «L’heure est venue pour la high-tech» («Time’s Up Tech»), une référence au mouvement «Time’s Up» de défense des personnes victimes de harcèlement sexuel, né dans la foulée du #MeToo en octobre 2017. Plusieurs personnes se sont succédé au mégaphone pour pousser les manifestants à exiger un changement de culture chez Google, où les femmes représentaient en 2017 seulement 31% des salariés, et 25% des responsables. Claire Stapleton, une organisatrice, s’est félicitée du succès du mouvement, expliquant que l’idée était née lundi et s’était propagée dans l’entreprise via un groupe d’emails réunissant quelque 1.500 personnes. «Je crois que (…) que nous voulons tous un changement (..) Je crois que la direction nous écoute», a-t-elle déclaré. Après l’article du «NYT», Sundar Pichai avait envoyé un courriel aux employés indiquant que 48 salariés, dont 13 hauts responsables, avaient été renvoyés pour harcèlement sexuel ces 2 dernières années, sans indemnité. Il a assuré que le groupe ne tolérait plus aucun comportement déplacé.