Le métavers à la rencontre du design, affranchi «de toutes contraintes»

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Une table faite en eau de mer, un cône bleu qui se fond dans un désert… Ces objets conceptuels qui n’ont pas d’existence physique sont accessibles dans le métavers, permettant à des designers de s’affranchir «de toutes contraintes».

Sous les dorures de l’hôtel de Soubise, dans le quartier du Marais, seize duos de designers et d’artistes numériques ont projeté, lors des dix jours de la «Paris Design Week», des oeuvres disponibles dans ces univers virtuels sous forme de NFT, des certificats d’authenticité numérique infalsifiables.

Une manière de libérer les créateurs des contraintes du monde réel. «Je pense que les décorateurs et les designers ont leur mot à dire sur ces nouveaux univers virtuels», explique Jean-Christophe Camuset du magazine Elle Décoration, à l’origine du projet. «Ils peuvent apporter leur expertise (…) et leur savoir-faire». Charlotte Taylor, artiste numérique britannique, et Constance Guisset, designer française, travaillaient depuis février sur une lampe impossible à reproduire dans la réalité, constituée d’une courbe et d’une source de lumière en lévitation dans un décor crépusculaire.

Les deux femmes ont cherché à s’éloigner le plus possible de la réalité. Pour Constance Guisset, travailler dans le métavers était l’occasion de s’affranchir de toutes les limites réelles de son métier de designer. «Je voulais créer quelques chose de nouveau (…) un objet libéré de toutes contraintes», explique-t-elle. «Le métavers est un espace d’expérimentation et de jeu», souligne pour sa part Charlotte Taylor. Certains éléments peuvent toutefois freiner la créativité, comme la technologie et le budget, puisqu’il faut des «ordinateurs très puissants» pour y faire naître des objets, ajoute l’artiste numérique.

Et si, selon Constance Guisset, «le monde virtuel est une source d’inspiration» pour les designers, certains objets «ne colle(nt) pas du tout avec le monde virtuel» précise-t-elle. Elle prend l’exemple d’un banc sur lequel elle travaille actuellement, qui a une double fonction: un côté pour assister à un concert, un autre pour la messe.

«Ce n’est pas assez sexy pour ce monde virtuel», explique Constance Guisset dans un sourire.  Certains artistes ont quant à eux préféré réaliser des oeuvres plus tangibles dans le monde virtuel, qu’ils ont aussi concrétisé dans le monde réel. Six séries d’objets physiques accompagnent ainsi les seize oeuvres numériques.

L’artiste 3D Anthony Authié et le designer Sam Buckley ont créé dans le métavers une suite de formes géométriques 3D qui s’emboîtent pour faire une chaise colorée. Cette chaise, ils l’ont aussi conçue dans le monde réel comme une sorte de pont entre les deux univers. A

utre passerelle, le Mobilier National a dévoilé dans cette exposition une oeuvre virtuelle réalisée par l’artiste numérique Vincent Poinas et le designer Sylvain Dubuisson: un NFT inspiré par un fauteuil bien réel, le modèle «Suite Ingénue» en cuir vert amande et aux pieds en spirale d’acier laqué, conçu en 1991 sur commande de Jack Lang alors ministre de la Culture.