Lourdement endetté, Atos fixe le cadre de son refinancement avec l’Etat

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Un cadre de refinancement présenté aux créanciers avec l’Etat au secours des «activités stratégiques» utilisées pour la dissuasion nucléaire: le groupe informatique français Atos, pilier technologique des JO-2024 lourdement endetté, est à la recherche de 1,2 milliard d’euros et veut convertir en actions près de la moitié de sa dette. Les propositions des créanciers, sur la base de «l’ensemble de son périmètre d’activité» – c’est-à-dire sans démantèlement de l’entreprise -, sont attendues le 26 avril, a indiqué Atos mardi. Un accord de principe avec un groupe de banques et l’Etat sur un financement intermédiaire de 450 millions d’euros, permettant de donner de l’air à Atos jusqu’à la conclusion d’un accord de refinancement «d’ici juillet 2024», a aussi été annoncé. En échange d’un prêt de 50 millions d’euros, l’Etat aura «une action de préférence» sur Bull SA, une partie de la filiale «big data» et sécurité (BDS) qui contrôle les activités sensibles et souveraines d’Atos (notamment des supercalculateurs utilisés pour la dissuasion nucléaire et des contrats avec l’armée française), a indiqué le DG Paul Saleh lors d’une conférence téléphonique. Ce prêt constitue «une 1ère étape dans la protection des activités stratégiques du groupe», annoncée fin mars par le ministère français de l’Economie, qui «utilisera tous les moyens à sa disposition pour (les) garantir», a indiqué le ministre Bruno Le Maire dans un communiqué séparé. Atos est plombé par une dette colossale s’élevant à près de 5 milliards d’euros, dont 3,65 milliards d’euros d’emprunts et d’obligations à rembourser ou refinancer d’ici fin 2025. L’entreprise, qui a perdu 80% de sa valeur boursière en un an, est assistée par une mandataire ad hoc dans sa procédure amiable de conciliation avec ses créanciers. Atos a vu s’effondrer coup sur coup ces dernières semaines deux opérations dans le cadre d’un plan de sauvetage lancé en 2022 comprenant sa scission en 2 entités et qui devait lui apporter de l’argent frais: la vente de ses activités historiques d’infogérance, Tech Foundations, au milliardaire tchèque Daniel Kretinsky et celles de «big data» et sécurité, BDS, à Airbus. Le cadre de refinancement présenté aux créanciers rebat les cartes quant aux éventuels futurs repreneurs du groupe. «Nous allons prendre toutes les propositions d’ici le 26 avril et les examiner. Nous avons mis des paramètres très clairs de ce qu’on essaye d’obtenir», a déclaré Paul Saleh. «Nous allons évaluer toutes les propositions et en discuter avec nos créanciers», a-t-il précisé. David Layani, 1er actionnaire d’Atos à travers sa société Onepoint, veut conserver tous les actifs du groupe, alors que l’entreprise a vu ses effectifs passer sous les 100.000 salariés dans le monde en 2023. Il doit présenter son projet fin avril. La société d’investissement Butler Industries lui a apporté son soutien dimanche, ce qui a permis au titre d’Atos de grimper de près de 19% à la Bourse de Paris lundi. Si Daniel Kretinsky «est intéressé, il fera partie des tiers qui soumettront leurs propositions» d’ici le 26 avril, a évacué Paul Saleh. Quant au français Dassault Aviation, en partenariat avec le groupe de conseil en ingénierie Astek, il serait sur les rangs pour les activités BDS. Devant les investisseurs, Atos a également présenté son nouveau plan d’affaires à long terme sur la période 2024-2027, avec les hypothèses d’un c.a. d’environ 9,9 milliards d’euros en 2024, puis d’environ 11,4 milliards d’euros en 2027, avec «une reprise des activités commerciales à partir de fin 2024». En 2023, Atos a réalisé un c.a. de 10,7 milliards d’euros, en recul de 5,1% sur un an, et affiché une perte nette de 3,4 milliards d’euros, en grande partie due à une dépréciation d’actifs. Le groupe informatique, qui est l’un des piliers technologiques des JO 2024 à Paris, doit notamment assurer la gestion des 300.000 accrédités, la diffusion instantanée des résultats, ou encore des services en matière de cybersécurité.