Procès Zemmour : échanges houleux et questions de procédures

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Le procès du polémiste d’extrême droite Eric Zemmour pour ses propos controversés sur les migrants mineurs isolés n’était toujours pas entré dans le vif du sujet mercredi en début d’après-midi, après une succession d’échanges houleux entre avocats, et de demandes de renvoi et de procédure. Le candidat putatif à l’élection présidentielle n’est pas présent devant le tribunal correctionnel, «afin d’éviter que l’enceinte judiciaire ne se transforme en studio de télé d’information en continu», avait indiqué la veille son avocat Me Olivier Pardo. Le tribunal avait prévu dès l’ouverture de l’audience à 9h45 qu’il serait «particulièrement vigilant» concernant la «sérénité des débats», mais le ton est monté dès les 1ères minutes sur la question de la recevabilité de certaines parties civiles. Une trentaine d’entre elles se sont constituées, dont les associations SOS Racisme, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) et la Maison des Potes. Mais aussi une vingtaine de conseils départementaux – les mineurs non accompagnés étant pris en charge par l’aide sociale à l’enfance, gérée par les départements. Ils sont ici «pour faire de la politique», martèle Me Pardo. «Pour faire nombre, pour faire masse», abonde Me Olivier Baratelli, qui défend le directeur de publication de la chaîne d’information Cnews, jugé au côté d’Eric Zemmour comme c’est l’usage dans les procès de presse. Tous deux ont tour à tour longuement plaidé pour le renvoi de l’audience, tout en s’écharpant avec leurs confrères des parties civiles. Chacun se coupe la parole et la présidente Delphine Chauchis menace de suspendre l’audience. Le renvoi «arrange manifestement un des prévenus», «c’est une stratégie», lance alors Me Patrick Klugman au nom de SOS Racisme. Après une courte délibération et un rejet des demandes de renvoi, les débats se sont poursuivis avec des questions de procédure. Me Pardo d’abord, a soutenu que la citation pour provocation à la haine raciale ne se tenait pas : «Quand on dit «les Arabes», on sait de quoi on parle», a-t-il dit. «Mais les mineurs isolés ne sont ni une race, ni une nation, ni une ethnie». Pendant près de 2 heures, Me Baratelli a ensuite listé une par une les parties civiles dont il conteste la constitution. Ce, sous l’exaspération croissante du tribunal et alors que l’audience est normalement prévue sur une seule journée. Habitué des sorties controversées et des procédures judiciaires, Éric Zemmour est cité à comparaître pour complicité de provocation à la haine raciale et d’injure raciale, pour des propos tenus sur Cnews le 29 septembre 2020. Lors d’un débat de l’émission «Face à l’info» sur les mineurs isolés après un attentat devant les ex-locaux de «Charlie Hebdo», le chroniqueur avait déclaré: «ils n’ont rien à faire ici, ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c’est tout ce qu’ils sont, il faut les renvoyer et il ne faut même pas qu’ils viennent». Sa défense estime que M. Zemmour n’a fait que «redire avec des mots différents» les inquiétudes exprimées par les autorités sur la délinquance liée aux mineurs non accompagnés. Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a d’ores et déjà sanctionné en mars la chaîne d’information d’une amende de 200.000 euros, pour «incitation à la haine» et «à la violence». Les prises de position d’Eric Zemmour, 63 ans, lui ont valu depuis une dizaine d’années une quinzaine de poursuites en justice. Plusieurs fois relaxé, il a été condamné à deux reprises pour provocation à la haine. L’ancien journaliste a été contraint à la mi-septembre de quitter l’émission quotidienne phare de Cnews à cause de ses ambitions présidentielles pour 2022. Il ne s’est encore pas déclaré candidat mais, selon des sources proches, il devrait le faire avant un 1er meeting de campagne envisagé début décembre.