De France Télévisions à Radio France, l’ensemble de l’audiovisuel public est appelé à la grève jeudi et vendredi, au moment où l’Assemblée nationale doit se saisir du projet de fusion express du secteur défendu par Rachida Dati. Aux personnels, la ministre de la Culture a lancé dimanche: «Je veux vous garantir non seulement une pérennité, mais (aussi) votre force» dans un univers de «concurrence exacerbée». Des perturbations sont à attendre sur les différentes antennes. Le débat jeudi soir sur France 2 entre le Premier ministre, Gabriel Attal, et le président du RN, Jordan Bardella, n’est cependant pas menacé, assure-t-on à la direction de France TV. Rachida Dati a pris le dossier de l’audiovisuel public à bras-le-corps dès son arrivée au gouvernement en début d’année. Elle prévoit une phase transitoire avec une holding commune au 1er janvier 2025, puis une fusion un an après. Quelque 16.000 salariés sont concernés. «Le moment politique est venu», considère la ministre, après une tentative de rapprochement par son prédécesseur Franck Riester stoppée par le Covid-19. Elle se prévaut du soutien du président de la République, Emmanuel Macron, «très attaché à l’audiovisuel public». Pour accélérer, l’ex-LR s’est appuyée sur une proposition de loi du sénateur Laurent Lafon (Union centriste) programmant une holding, déjà adoptée en juin 2023 par la chambre haute. D’après la ministre, l’audiovisuel public dispose de «forces indéniables» mais «dispersées», ce qui l’expose à un «risque d’affaiblissement» face à aux plateformes internationales comme Netflix et aux chaînes privées. La société géante dénommée «France Médias» aurait un budget de quatre milliards d’euros. Et le but n’est pas de réaliser des économies, martèle-t-on au gouvernement. Au contraire, la réforme aurait un coût les 1ères années. Outre France Télévisions et Radio France, le mastodonte de l’audiovisuel rassemblerait également l’Ina (Institut national de l’audiovisuel) et France Médias Monde (RFI, France 24). L’intégration de ce dernier groupe fait cependant débat jusque dans le camp présidentiel. Le texte de loi est au menu des députés jeudi et vendredi en première lecture et un vote solennel est programmé le 28 mai. Une 2ème lecture est déjà inscrite au Sénat le 19 juin. Les organisations syndicales du secteur ne sont pas restées l’arme au pied: des préavis de grève ont été déposés dans les quatre sociétés publiques, où l’on craint pour les moyens et les emplois. Particulièrement mobilisés, les syndicats de Radio France redoutent que la télévision ne phagocyte la radio. «Cette réforme remet en cause l’indépendance éditoriale et budgétaire de Radio France, garante d’une véritable stratégie de l’audio – radio et numérique – plébiscitée par le public», font-ils valoir. «Pourquoi engager (le secteur) dans une fusion qui s’annonce longue, complexe, anxiogène pour les salariés, et sans réel objectif éditorial ?», demandent aussi les syndicats de France TV. A tous les étages, les personnels s’interrogent: «Il y a un hiatus entre les réussites du service public et une petite musique qui le critique», relève une cadre. Le sort de FMM ne paraît pas tranché. Le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, a affirmé que le gouvernement était finalement pour son exclusion de l’entreprise unique. Mais les discussions pourraient être serrées avec la droite qui est à l’inverse attachée à son inclusion. De son côté, la gauche torpille holding comme fusion. LFI voit dans ce projet «l’aboutissement du dénigrement et de l’affaiblissement» du service public opéré par Emmanuel Macron. «C’est pas le retour de l’ORTF qui va nous permettre de concurrencer Netflix», renchérissent les écologistes. Autre volet sensible: celui de la publicité. Mme Dati a fait voter en commission à l’AN un déplafonnement des recettes publicitaires de l’audiovisuel public mais le sujet doit être retravaillé, se sont engagés les parlementaires.
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