Propos d’Eric Zemmour : carton jaune du CSA pour CNews

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Carton jaune pour CNews: le CSA a mis en demeure la chaîne d’info du groupe Canal+ de respecter ses obligations, notamment en termes d’incitation à la haine et à la violence, après des propos de sa vedette Eric Zemmour sur l’islam et la colonisation de l’Algérie. Cette mise en demeure rendue publique mardi constitue un sérieux avertissement pour la chaîne d’info. Une telle décision peut précéder, en cas de manquements répétés, une sanction qui peut aller de la suspension temporaire d’un programme à un retrait de l’autorisation de la chaîne, en passant par des amendes ou privations d’écrans publicitaires. Dans un communiqué, le groupe Canal+ a annoncé qu’il allait déposer un recours pour abus de pouvoir auprès du Conseil d’Etat, considérant cette mise en demeure «injustifiée» et «contraire aux principes de la liberté d’expression». Pour CNews, les propos mis en cause relevaient de «l’expression du pluralisme des courants de pensées et d’opinion», et le débat épinglé par le CSA était équilibré, même si les opinions exprimées «ont pu «heurter, choquer ou inquiéter»». Eric Zemmour est devenu mi-octobre la vedette de «Face à l’info», une émission quotidienne de CNews lancée peu après la polémique déclenchée par son virulent discours sur l’islam et l’immigration fin septembre à la «convention de la droite», organisée par des proches de Marion Maréchal Le Pen. Et plusieurs de ses interventions dans l’émission présentée par Christine Kelly (ancienne membre du CSA) ont suscité un tollé. En particulier celle du 23 octobre, dans laquelle il avait assimilé l’islam et l’islamisme, avant d’évoquer la conquête de l’Algérie par la France dans les années 1840 en se disant, en tant que Français, «du côté» du général Bugeaud qui, lorsqu’il «arrive en Algérie, (…) commence à massacrer les musulmans et même certains juifs». Des propos qui, pour le CSA, contreviennent à plusieurs des obligations de la chaîne. En effet, le gendarme de l’audiovisuel juge que ces propos «ont pu être perçus» comme «une légitimation de violences commises par le passé à l’encontre de personnes de confession musulmane mais aussi comme une incitation à la haine ou à la violence à l’égard de cette même catégorie de la population». Et il juge que la séquence exprimait un «rejet insistant des personnes musulmanes dans leur ensemble, tendant à encourager des comportements discriminatoires en raison de la religion». En outre, le régulateur estime que CNews, en diffusant ces propos en direct «sans réaction ni même modération» de la part de l’animatrice, a manqué à son obligation de garder la maîtrise de son antenne, qui s’impose en toutes circonstances. Le CSA a également indiqué avoir transmis à la justice les éléments en sa possession concernant cette séquence, comme il l’avait déjà fait pour son discours retransmis sur LCI. Plusieurs autres sorties du journaliste, écrivain et polémiste dans «Face à l’info» ont fait polémique cet automne. Parmi elles, son intervention du 15 octobre sur l’homosexualité (qu’il avait qualifiée de «choix») et l’homoparentalité (fruit selon lui d’un «caprice») a pu selon le CSA être «perçue comme stigmatisant les personnes homosexuelles». Ces polémiques à répétition ont poussé Canal+ à diffuser «Face à l’info» en différé à partir de la fin octobre, comme l’avait recommandé le comité d’éthique du groupe (filiale de Vivendi). Une mesure qui vise à éviter de nouveaux débordements à l’antenne. Outre CNews, LCI a également été réprimandée par le CSA pour des propos de l’auteur du «Destin français» : le régulateur avait «fermement mis en garde» la chaîne d’info du groupe TF1 pour avoir diffusé son discours à la «convention de la droite» en direct, sans mise en contexte ni contradiction à l’antenne. Ce discours avait valu au polémiste d’être écarté de l’antenne de RTL et pourrait lui causer de nouveaux ennuis judiciaires, alors même qu’il a été définitivement condamné mi-septembre pour «provocation à la haine religieuse».