S. SITBON GOMEZ (France Télévisions) : «Les grilles de programmes sont faites pour évoluer»

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Dans le cadre d’une conférence digitale organisée jeudi 26 novembre par l’Association des Journalistes Médias, Stéphane SITBON-GOMEZ, Directeur des antennes et des programmes du Groupe France Télévisions a répondu pendant 1h30 à différentes questions liées à ses ambitions en matière de programmes, d’enjeux économiques et de mixité. A cette occasion, nous avons sélectionné les citations les plus marquantes de cet échange.

MEDIA +

Quel est l’impact de la crise sanitaire sur vos projets en développement ?

STÉPHANE SITBON-GOMEZ

Dans le contexte actuel, nous pilotons les projets au fur à mesure des évolutions de la situation. Vingt-sept productions ont été arrêtées au cours des dernières semaines, même si les tournages ont repris. En revanche, nous allons décliner, à travers nos différentes antennes, l’ambition que Delphine Ernotte a présenté devant le CSA en juin dernier. Il y a d’abord un enjeu de diversité, de renforcement de nos offres culturelles mais aussi de prise en compte plus importante des thématiques environnementales et écologiques. Je souhaite élargir à cela, toutes les tendances que l’on sent monter dans la société à l’issue du confinement comme le bien-être et le bien vivre. Ce sont des préoccupations et des interrogations très fortes de nos publics. Nous travaillons là-dessus. Nous présenterons en janvier 2021 les évolutions mises en place et j’espère qu’elles seront à la hauteur des attentes. 

MEDIA +

Vous avez décidé de renouveler vos grilles en supprimant plusieurs émissions : «Je t’aime etc.», «Pièces à conviction», «Personne n’y avait pensé», «D’art d’art»… Êtes-vous dans une logique de renouvellement pour combler les faiblesses de la grille ?

STÉPHANE SITBON-GOMEZ

Les grilles de programmes sont faites pour évoluer. Parmi les émissions que vous venez de citer, il y a des raisons différentes pour chacun des arrêts. Sur «Personne n’y avait pensé», il s’agit d’une réflexion que nous avions depuis 18 mois dans le cadre de la régionalisation de France 3 pour que l’information de proximité régionale démarre à 18h30. Cela nous a obligés à raccourcir le bloc jeux de 30’. Sur la question de «Je t’aime etc.», c’est un programme de qualité mais qui n’a pas forcément trouvé autant son public que «Ça commence aujourd’hui» ou «Affaire conclue». Pour accompagner le succès de nos après-midis, nous sommes donc dans une logique d’efficacité. Et comme nous sommes dans un contexte de sobriété et d’économie, nous réfléchissons pour savoir si nous investissons l’après-midi en semaine sur un nouveau magazine (en remplacement de «Je t’aime etc.»), ou si nous faisons du redéploiement budgétaire le week-end.

MEDIA +

Y’aura-t-il d’autres arrêts de programmes de flux ?

STÉPHANE SITBON-GOMEZ

Ce n’est pas mon objectif. La télévision est un média d’habitude extrêmement vivant. De ce fait, nous devons regarder ce que consomme le public et nous ajusterons en fonction. De temps en temps, nous prendrons aussi des risques en allant sur des cases qui fonctionnent pour proposer de nouvelles choses.

MEDIA + 

Quelle est votre ambition sur la représentation des femmes à l’antenne ?

STÉPHANE SITBON-GOMEZ

C’est un enjeu majeur dont s’est emparé le groupe. Quand Delphine Ernotte est arrivée à France Télévisions il y a quelques années, il y avait 20% d’expertes sur les antennes. Aujourd’hui, nous atteignons la parité à 50%. C’est un sujet que l’on pilote à la fois avec nos animateurs et animatrices mais aussi avec nos invités en plateau. Nous avons une politique offensive sur la représentation des femmes sur nos antennes. Nous allons aussi développer cette ambition en mettant en place des quotas de réalisatrices, notamment dans la fiction.

MEDIA +

Quel avenir pour l’exposition du cinéma sur les antennes de France Télévisions ?

STÉPHANE SITBON-GOMEZ

La programmation cinématographique de France Télévisions n’a jamais été aussi riche dans sa diversité. Depuis le confinement, chaque semaine, 9 millions de Français ont regardé un film sur nos chaînes. De plus, nous avons sur France.tv en non-linéaire 10 films présentés en exclusivité et qui réalisent de bonnes audiences. On s’adresse aussi bien à un public de cinéphiles qu’aux néophytes. Et à l’avenir, l’offre cinéma du groupe doit continuer de faire partie des piliers identifiants du service public.

MEDIA +

Quel regard portez-vous sur le succès des plateformes de SVOD ?

STÉPHANE SITBON-GOMEZ

À l’heure actuelle, la concurrence principale des chaînes en clair c’est Netflix. Les plateformes nous ont posé un véritable défi créatif. L’exigence c’est de sortir des sentiers battus. Quand il y a 9 millions d’abonnés à Netflix et 3 utilisateurs par compte, cela signifie qu’il y a 30 millions de Français susceptibles de regarder la plateforme, y compris notre public.

MEDIA +

Comment gagner la bataille ?

STÉPHANE SITBON-GOMEZ

Notre force est d’avoir une offre éditoriale qui n’est pas dictée par les algorithmes. Nous avons un lien beaucoup plus fort et direct avec notre audience. De plus, le public change. Des téléspectateurs plus âgés peuvent se retrouver sur des plateformes, tandis qu’un public plus jeune peut consommer des programmes de France 2, comme c’est le cas avec la série «Dix pour cent». La télévision n’a pas dit son dernier mot, il suffit de regarder les résultats de l’année 2020. La télévision publique est beaucoup plus forte sur le chantier des contenus.

MEDIA +

Quelles sont vos cartouches ? 

STÉPHANE SITBON-GOMEZ

Diversifier la création, aller sur des propositions plus originales, renforcer nos investissements sur la création. On assume pleinement d’être en situation de concurrence et nous ferons tout pour mener cette offensive.