La presse écrite française veut mieux défendre ses intérêts et fonde une Alliance

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Plusieurs organisations professionnelles de la presse écrite française ont créé mercredi l’Alliance de la presse d’information générale (Apig), pour parler d’une seule voix et mieux défendre leurs intérêts, notamment face aux géants du numérique. Des grands quotidiens parisiens jusqu’aux quotidiens départementaux et autres hebdos de portée régionale ou locale, elle regroupe en tout 305 journaux publiés par 175 entreprises, soit un total de 27.000 salariés dont 10.000 journalistes, auxquels s’ajoutent 25.000 correspondants. L’Alliance, qui a tenu sa 1ère AG ce mercredi à Paris, a été fondée par le Syndicat de la presse quotidienne nationale (SPQN), l’Union de la presse en région (Upreg) et le Syndicat de la presse hebdomadaire régionale (SPHR). Outre ces organisations fondatrices, elle accueille trois membres associés, l’AFP et deux associations représentant les newsmagazines (AIPG) et les quotidiens gratuits (APGI). Dans un secteur qui historiquement a toujours eu du mal à parler d’une seule voix, la création de cette alliance a pris des années. «Nous avons considéré que ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous oppose et s’il y a toujours des différences, nous n’avons plus de divergences», a estimé Jean-Michel Baylet, patron du groupe La Dépêche et dirigeant de l’Upreg qui a pris la tête de l’Apig pour deux ans, dans le cadre d’une présidence tournante. «Les guerres de frontières, c’est fini», a-t-il lancé lors d’une conférence de presse, soulignant que les journaux, qui se sont longtemps vus avant tout comme des concurrents et défendaient leur pré carré, devaient se mobiliser notamment pour instaurer un «équilibre économique» avec les géants du net, qui «pillent nos contenus et nos recettes publicitaires», et s’unir pour mieux se faire entendre auprès des pouvoirs publics. Le feu vert la semaine dernière des eurodéputés à la création d’un droit voisin, qui obligerait les Gafa (acronyme désignant les géants du web Google, Apple, Facebook et Amazon) à rémunérer la presse en contrepartie de l’exploitation de ses contenus, en faveur duquel les fondateurs de l’Alliance avaient milité, montre selon lui que «l’unité, c’est l’efficacité».Outre cette bataille sur le droit voisin qui va se poursuivre dans les instances européennes, la priorité de l’Alliance est d’établir un «plan de filière» qui sera présenté au gouvernement, a-t-il souligné. Sans détailler les propositions qu’il pourrait inclure, il a fait référence à des mesures salvatrices comme en ont connu les secteurs du livre et du cinéma, avec la création du prix unique du livre et du CNC. La création de l’Alliance avait été précédée, en juillet, du retour au sein de l’Upreg du groupe de presse régionale Ebra (filiale du Crédit Mutuel, qui possède de nombreux titres dans l’Est, en Bourgogne et Rhône-Alpes, dont les «Dernières nouvelles d’Alsace», «l’Est Républicain», «Le Progrès» et «Le Dauphiné Libéré»), dont il s’était retiré en 2015. Un autre signe de la volonté des éditeurs de presse de se serrer les coudes face aux défis du secteur. L’Upreg est elle-même l’illustration de ce mouvement centrifuge, puisqu’elle avait été formée en 2014 par le syndicat de la presse quotidienne régionale (SPQR) et le syndicat de la presse quotidienne départementale (SPQD), pour mieux défendre leurs intérêts sur des sujets communs. Au sein de l’Alliance, les fédérations adhérentes garderont leur autonomie sur les dossiers relevant de leurs strictes compétences (notamment les questions sociales, chacune disposant de sa propre convention collective), mais tous leurs salariés seront transférés dans la nouvelle structure au 1er janvier 2019, et ils s’installeront en avril dans un siège unique, situé à Paris dans le XIIIe arrondissement.