Mostra de Venise : le Lion d’or décerné au documentaire «All the Beauty and the Bloodshed»

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Director Laura Poitras holds the Golden Lion award for best film for 'All the Beauty and the Bloodshed' at the closing ceremony of the 79th edition of the Venice Film Festival in Venice, Italy, Saturday, Sept. 10, 2022. (AP Photo/Domenico Stinellis)

 La Mostra de Venise a braqué les projecteurs sur le drame des opiacés en sacrant un documentaire sur la photographe Nan Goldin et sa lutte acharnée contre ce scandale sanitaire qui a fait des centaines de milliers de morts aux Etats-Unis. Le jury présidé par l’actrice Julianne Moore a décerné son Lion d’Or à la réalisatrice, Laura Poitras, 58 ans, et sacre ainsi une troisième réalisatrice d’affilée, après la Française Audrey Diwan l’an dernier («L’Evènement») et la Sino-Américaine Chloé Zhao («Nomadland») en 2020. Il distingue surtout une personnalité pugnace qui sonde sans relâche les zones d’ombre de l’Amérique: après avoir travaillé sur l’occupation américaine en Irak puis Guantanamo, elle devient la confidente du lanceur d’alerte Edward Snowden et réalise «Citizenfour» (2015), qui obtient l’Oscar du meilleur documentaire. Pas de révélations fracassantes cette fois dans «All the Beauty and the Bloodshed», le film primé à Venise, mais un voyage à travers la vie de Nan Goldin, photographe de 68 ans connue pour ses clichés du New York underground et qui a tant côtoyé la mort, du sida à la crise des opiacés, son dernier combat. Car Nan Goldin, qui était repartie de Venise et n’a pas pu venir chercher son prix, a pris la tête d’un combat à la David contre Goliath contre la famille Sackler, principaux producteurs d’opiacés, des antidouleurs qui ont rendu dépendants et tué un demi-million d’Américains ces deux dernières décennies. «J’ai connu beaucoup de personnes courageuses dans ma vie, mais personne comme (Nan Goldin), qui a combattu cette famille très puissante», a déclaré la réalisatrice en recevant son prix. Le jury de Venise a envoyé un autre signal politique en décernant un Prix spécial au réalisateur Jafar Panahi, montrant que le cinéma ne plierait pas devant la censure en Iran et offrant son soutien à un cinéaste qui paie de sa liberté son envie de créer. Lion d’or en 2000 avec «Le Cercle», Panahi est le seul cinéaste en compétition à n’avoir pas pu fouler le tapis rouge, emprisonné depuis juillet par le régime des mollahs. Dans «No Bears» («Les Ours n’existent pas»), le film primé, il met en abyme sa propre situation, un pied de nez brillant à la censure.