Annecy : le secteur de l’animation ouvre ses portes aux jeunes talents 

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Pour nombre d’étudiants réunis cette semaine au festival d’animation d’Annecy, la recherche de travail se fait sans (trop de) stress et dans la même effervescence et ambiance bon enfant que les projections : le secteur, en plein âge d’or, recrute. Plus d’une centaine de jeunes en dernière année, issus de la prestigieuse école des Gobelins, ont participé cette semaine à une séance de «speed recruiting», échangeant pendant 10 minutes avec des studios. Netflix, Illumination («Les Minions»), Nickelodeon… Les représentants de près de 40 sociétés ont enchaîné les rendez-vous dans un brouhaha. Julien Motteau, 24 ans, spécialisé en animation 2D et storyboard, en a passé un avec Xilam, le studio de Marc du Pontavice («Oggy et les Cafards», «J’ai perdu mon corps»). «J’ai montré ce que je faisais, il m’ont parlé de ce qu’ils recherchaient en ce moment, ils m’ont donné des contacts, ça s’est bien passé, très amical», résume le jeune homme, en bermuda et chemise à fleurs. Malgré le stress des entretiens, «c’est un milieu qui est quand même assez détendu», souligne son camarade Mathieu Giazzi. «Personne n’est en chemise blanche, ni les recruteurs, ni nous», sourit-il. Avec la pandémie et l’explosion de la demande de contenus, le travail ne manque pas: l’animation est dans les jeux, le live action (prise de vues réelles), le motion design (animation graphique), sur les téléphones «et tous les écrans possibles», constate Cécile Blondel, directrice du développement international des Gobelins. Les étudiants n’ont pas forcément besoin d’Annecy pour trouver du travail avant leur sortie d’école, comme l’explique Bénédicte Duhamel, responsable des relations entreprises de l’école Rubika à Valenciennes. «L’année dernière sur la promo spécialisée en 3D, les 3/4 étaient placés après le jury» de fin d’études, ajoute-t-elle, évoquant un «taux de placement de 90% à un an». Selon le directeur animation chez Gaumont, Cyril Le Pesant, «la grande effervescence» du marché continue même si les plateformes «ralentissent leurs carnets de commandes dans un contexte de concurrence accrue». 

Retour de la 2D : Netflix produit toujours «près d’une douzaine de séries animées en France» par an, souligne l’un de ses dirigeants John Derderian, citant les studios Fortiche («Arcane») ou Blue Spirit («Blue Eye Samourai»). «Il y a de super écoles ici en France et un amour de l’animation» qui se retrouve à Annecy, ajoute-t-il. Le festival, qui réunit plus de 15.000 participants, est un «mélange intéressant de jeunes étudiants super talentueux qui (…) savent qu’ici, ils vont voir des gens qui aiment cet artisanat plus que n’importe qui», complète Karen Toliver, directrice des films d’animation chez Netflix. «L’un des meilleurs aspects du boom de l’animation, c’est la masse d’opportunités offertes dans l’industrie pour les jeunes», estime Orion Ross, vice-président Animation pour Disney en Europe. Pour les studios, cet essor peut entraîner des difficultés, «les meilleurs» talents étant «toujours occupés», selon lui, mais comme les projets d’animation prennent généralement deux ans, les jeunes recrues ont le temps d’acquérir l’expérience nécessaire. L’âge d’or de l’animation s’accompagne aussi d’un retour en grâce de la 2D (plus rapide à produire), comme en témoigne le succès grandissant du studio La Cachette, auteur d’un court-métrage Star Wars pour Disney+. Et ce alors même que ses fondateurs, des anciens des Gobelins, s’entendaient dire il y a 10 ans que «la 2D c’était pas le futur», selon l’un d’entre eux, Oussama Bouacheria.