ARTE : la série «Trepalium» s’empare de la problématique contemporaine du chômage

326

La série d’anticipation «Trepalium», diffusée à partir de jeudi sur ARTE, s’empare de la problématique contemporaine du chômage qu’elle transpose dans un futur proche où actifs et chômeurs sont séparés physiquement par un mur infranchissable. «Trepalium» est le mot latin qui signifie «travail». Cette fiction, très attendue par les amateurs de séries, dépeint un monde où 80% de la population, privée d’emploi, doit vivre dans «La Zone», derrière un mur, en marge des actifs de «La Ville». Pour apaiser le vent de révolte qui souffle sur le territoire des chômeurs, le gouvernement, dirigé par Nadia (Ronit Elkabetz), instaure un quota d’«emplois solidaires» qui contraint les actifs à embaucher des «zonards» sélectionnés avec une extrême rigueur.    Ruben Garcia, un ingénieur qui a le vent en poupe, embauche la zonarde Izia (Léonie Simaga). La série en six épisodes de 52’, qui coûté 6 millions d’euros, trouve «sa position toute naturelle» sur ARTE, note Olivier Wotling, directeur de la fiction de la chaîne. Le thème du travail est examiné «sous tous ses aspects, sociaux, politiques, économiques et bien sûr humains». «Trepalium», réalisée par le cinéaste belge Vincent Lannoo, «joue sur les peurs, les aspirations qui traversent notre société aujourd’hui», ajoute-t-il. L’idée a germé il y a dix ans dans l’esprit des auteurs Sophie Hiet et Antarès Bassis. «La problématique du travail, très centrale dans nos sociétés, interroge notre rapport au travail, ce qu’est l’individu, nos identités, puisque le travail définit le lien social, et que ne pas avoir de travail crée beaucoup de vide», explique Sophie Hiet, «c’est devenu de plus en plus synonyme de souffrance, c’est le signe d’une société qui ne va pas très bien». Le travail détermine tous les rapports, renchérit la comédienne israélienne Ronit Elkabetz. C’est même la première question que les gens se posent dès le premier échange lors d’une rencontre. «Quand on n’a pas cette relation au travail, on est à l’extérieur de tout», poursuit-elle, «et quand il y a une telle quantité de chômeurs, c’est très dangereux, ce sont les relations humaines qui paient le prix fort».

Le choix de l’anticipation permet aux auteurs d’éclairer le monde d’aujourd’hui, avec le décalage nécessaire. «Il y avait dans le script cet esprit de régression que peut entraîner le libéralisme poussé à l’extrême», note Vincent Lannoo. «On voulait raconter quelque chose de simple et d’universel. On s’est beaucoup inspiré du réel», ajoute Antarès Bassis. «Nous avons aussi trouvé une certaine inspiration au cinéma avec des films comme «Bienvenue à Gattaca» (Andrew Niccol), ou «Soleil vert»» (Richard Fleischer)». Côté séries, «Black Mirror» et «Real humans» ont beaucoup influencé le réalisateur, tout comme «Peaky Blinders» pour les costumes. Pour les décors, Vincent Lannoo avait envie de «rétrofuturisme». Il rêvait d’une savante fusion de «Madmen» et de «Hunger Games». Il a cherché du côté des visions futuristes d’architectes comme Oscar Niemeyer. Quel que soit le succès de «Trepalium», il n’y aura pas de saison 2,  prévient la productrice Katia Raïs. «En revanche, nous réfléchissons avec ARTE à une anthologie, c’est-à-dire prendre à chaque fois un syndrome d’aujourd’hui et le transformer en cauchemar de demain», explique-t-elle. «Le prochain thème sera le vieillissement de la population».