Atos présente ses résultats financiers annuels sous l’oeil inquiet des investisseurs

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Liquidités, niveau d’endettement, échéances… Le géant informatique Atos, en pleine déroute financière, présente jeudi ses résultats financiers annuels sous l’oeil inquiet des investisseurs et des pouvoirs publics, alors que son projet de cession au milliardaire tchèque Daniel Kretinsky semble à l’arrêt. «Tout le monde attend de savoir ce qu’Atos va dire au moment de ces résultats, le temps joue contre eux», commente Lionel Melka, associé gérant de la société de conseil pour les affaires Swann Capital. Les dernières annonces de l’entreprise, qui a renoncé début février à une augmentation de capital à hauteur de 700 millions d’euros et nommé une mandataire pour négocier avec ses créanciers, ont fait grimper l’inquiétude du marché. L’action d’Atos, dévaluée de plus de 70% depuis le début d’année, a atteint de nouveaux records à la baisse. En clôture lundi, elle ne valait que 2,25 euros. L’avenir de l’entreprise est dans le flou depuis plusieurs mois, alors que son projet de restructuration patine et que son niveau d’endettement affole les investisseurs, avec 3,65 milliards d’euros d’emprunts et obligations à rembourser ou refinancer d’ici fin 2025. «Ce qui va être scruté dans les résultats, c’est la partie liquidités, c’est-à-dire combien il y a d’argent dans les caisses, combien il y a de dettes, quelles sont les échéances», pointe Lionel Melka. «Atos n’est pas loin du défaut de paiement». Autour de l’administratrice ad hoc nommée pour assister l’entreprise dans la restructuration de sa dette (Hélène Bourbouloux, qui s’est notamment chargée des dossiers Casino et Orpea), vingt-deux établissements bancaires sont à la table des discussions. Mais, d’après les dernières analyses début février de l’agence de notation S&P Global, qui a dégradé fin janvier la note de d’Atos, «il y a un risque qu’un tel accord [avec les créanciers] n’aboutisse pas en raison du manque de confiance des investisseurs». D’autant que les négociations avec les banques sont étroitement liées à la santé financière de l’entreprise et à ses projets de reprise. L’ancien fleuron de l’informatique et de l’infogérance, après avoir annoncé sa scission en deux entités, souhaitait céder la partie Tech Foundations, qui regroupe les activités historiques d’infogérance, au milliardaire tchèque Daniel Kretinsky. Mais les discussions autour du projet de cession, officialisé à l’été 2023, semblent paralysées. Elles sont «toujours en cours», disait Atos début février. L’entreprise a répété à plusieurs reprises qu’elle n’avait «aucune certitude» que les tractations aboutissent et n’a pas fixé d’échéance aux discussions. Le projet de vente à Airbus des activités Big Data & Security (BDS), dévoilé début janvier, est lui aussi toujours en cours, les deux parties ayant entamé une phase de due diligence (consultation des comptes, NDLR). Les difficultés économiques et les incertitudes sur l’avenir de la société, qui emploie quelque 110.000 salariés dans le monde, suscitent aussi l’inquiétude des pouvoirs publics. Atos, qui possède des supercalculateurs notamment utilisés dans le secteur de la défense et le nucléaire, renferme des «enjeux sociaux et de souveraineté technologique», souligne Lionel Melka. Interrogée au Sénat mi-février, la nouvelle secrétaire d’État chargée du Numérique, Marina Ferrari, a martelé «la pleine et entière mobilisation de l’intégralité des membres du gouvernement» sur un dossier «crucial». Quelques jours plus tôt, Bruno Le Maire avait assuré aux Echos que l’État utiliserait «tous les moyens à sa disposition pour préserver les activités stratégiques d’Atos». Une mission d’information sénatoriale s’est également emparée du sujet et a déjà débuté avec des auditions à huis clos. Les dirigeants actuels, Jean-Pierre Mustier (président) et Paul Saleh (directeur général), seront entendus en public le 10 avril.