Avec «l’appel de Christchurch», la France tente de s’installer en pivot des débats sur la régulation d’internet

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La France tente de s’installer en pivot des débats sur la régulation d’internet, avec le lancement mercredi à Paris avec la Nouvelle-Zélande d’un «appel de Christchurch» contre l’extrémisme en ligne et un nouveau sommet «Tech for good». Ces réunions de dirigeants politiques et économiques internationaux autour d’Emmanuel Macron sont suivies par le salon des start-up VivaTech de jeudi à samedi à la Porte de Versailles, auquel se rendra le président français et la plupart des grands dirigeants de la tech conviés à l’Elysée. Après avoir beaucoup bousculé les cadres établis, l’internet doit désormais entrer «dans une phase de maturité» a expliqué le secrétaire d’Etat au numérique Cédric O. «Si les seuls États qui savent efficacement réguler les réseaux sociaux et les grands acteurs de la technologie sont des pays peu démocratiques, alors c’est qu’il y a un problème dans le système», a-t-il souligné. La diffusion en direct sur internet, par son auteur, le 15 mars du massacre de Christchurch, qui a fait 51 morts, a particulièrement marqué les esprits. «L’attaque était conçue pour être virale» sur la toile, et c’est «inédit à l’échelle mondiale», a souligné mardi Jacinda Ardern, la Première ministre néo-zélandaise, dans une interview au «Monde». Mme Ardern lançait mercredi à l’Elysée avec Emmanuel Macron cet «appel de Christchurch» pour agir contre le terrorisme et l’extrémisme violent sur internet. Le roi Abdallah de Jordanie, le président du Sénégal Macky Sall, le roi Abdallah de Jordanie, les Premiers ministres de Norvège, du Canada, du Royaume-Uni et de l’Irlande, et des représentants de géants du numérique tels Jack Dorsey, le PDG de Twitter, étaient présents pour lancer cet appel. «Nous cherchons à rassembler des gouvernements, mais aussi des entreprises de technologie (…) pour tenter d’établir un plan d’action à long terme» a-t-elle dit. «L’objectif est de se donner des axes de travail pour l’avenir» notamment en termes de «réactivité aux incidents» et de «collaboration» entre les différents acteurs, plates-formes, États et société civiles, explique de son coté l’Elysée. Cet «appel de Christchurch» était précédé d’«un «karanga», un appel traditionnel maori particulièrement poignant. En parallèle, plusieurs dizaines de dirigeants internationaux de la tech et de patrons français ont planchét mercredi avec des ministres français sur les manières dont la tech peut contribuer au bien commun. Cinq domaines ont été retenus: l’éducation, la diversité et le genre, l’avenir du travail, l’inclusion professionnelle et l’environnement. Un dîner au palais présidentiel était organisé mercredi soir pour «restituer» les conclusions et engagements devant les dirigeants politiques. Jack Ma (Alibaba, l’Amazon chinois), Ken Hu (Huawei), Virginia Rometty (IBM) , Borge Ekhlolm (Ericsonn), Dara Khosroshahi (Uber) Gillian Tans (Booking), Young Sohn (Samsung) seront présents avec des patrons français (Patrice Caine de Thales, Philippe Wahl de la Poste, Jean-Paul Agon de l’Oréal, Eric Leandri de Qwant, Frédéric Mazzella de Blablacar…). En outre, les ministres chargés du numérique du G7 planchent à Bercy autour du secrétaire d’Etat au numérique sur un projet de charte contre la haine en ligne, que la France voudrait faire adopter lors du sommet des chefs d’États et du gouvernement du G7 qu’elle présidera à Biarritz du 24 au 26 août. Ces discussions ne sont pas gagnées d’avance, car les Etats-Unis s’inquiètent des velléités régulatrices poussées par la France, au nom notamment de la liberté d’expression – un concept sacré outre-Atlantique. «Il peut y avoir des sensibilités différentes» sur la liberté de parole parmi les Etats, a souligné Cedric O. «Mais nous avons bon espoir que les plus grandes plates-formes mondiales» d’internet signent la charte, a-t-il ajouté. VivaTech, le salon des start-up et de la technologie, accueillera bon nombre des patrons de la tech.