Grève à iTELE: reprise des discussions

369

Les salariés et la direction d’iTELE ont eu des discussions mercredi pour trouver une issue à la grève qui est entrée mercredi dans son 10ème jour, alors que la gestion de la crise par la patron de Canal+, Vincent Bolloré, est de plus en plus critiquée. Après une 1ère session mercredi après-midi, les discussions pourraient reprendre mercredi soir ou jeudi matin, la direction devant apporter plus de précisions sur son projet, selon la Société des journalistes de la chaîne. Outre le départ de l’animateur controversé Jean-Marc Morandini, les salariés réclament une charte éthique pour garantir leur indépendance vis-à-vis de leur principal actionnaire, Vincent Bolloré, et davantage de moyens pour relancer la chaîne, lourdement déficitaire. «Avant de se prononcer, on attend d’avoir toutes les réponses de la direction», a déclaré Antoine Genton, président de la Société des journalistes d’iTELE, assurant que «tous les sujets avaient été évoqués». Quatre membres de l’état-major de la chaîne cryptée du groupe Vivendi ont rencontré les représentants des salariés: le n°2 de Canal+ Jean-Christophe Thiéry, le patron de la chaîne d’info Serge Nedjar, le directeur des antennes Gérald-Brice Viret et la directrice des ressources humaines du groupe, Sandrine Morin. Depuis le lundi 17 octobre, les journalistes votent chaque matin la grève à plus de 80% des voix, et de nombreuses autres rédactions et personnalités leur ont apporté leur soutien en manifestant devant iTELE et en tweetant avec le hashtag #JesoutiensiTele. Le conflit en cours à iTELE, d’une durée sans précédent, est une «bataille emblématique des enjeux qui traversent les médias et la profession de journaliste», estime «Le Monde» dans un éditorial mercredi, «notamment depuis que des groupes industriels puissants, comme Vivendi, ou des milliardaires en quête d’influence, ont pris le contrôle de nombreux supports». Le journal du soir condamne «le peu d’empressement des politiques à se signaler dans le dossier», qui «révèle la puissance financière de l’homme d’affaires». Après Benoît Hamon, Nathalie Kosciusko-Morizet et le parti communiste, Jean-Christophe Cambadélis a critiqué à son tour mercredi la gestion de la crise. «L’entêtement de la direction abime évidemment la chaîne», a condamné le 1er secrétaire du PS, dans l’émission «Questions d’info» (LCP-Le Monde-franceinfo-AFP). «Je pense qu’on a décidé, peut-être stratégiquement, de faire venir un certain nombre de personnes pour avoir une certaine tonalité de télévision, et que cette tonalité ne passe pas».

Le conflit a été déclenché la semaine dernière par l’arrivée à l’antenne de l’animateur Jean-Marc Morandini, mis en examen pour «corruption de mineur aggravée» notamment pour des castings douteux liés au tournage d’un film érotique. Jean-Christophe Cambadélis en appelle au Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui pourrait revenir sur le dossier dès la semaine prochaine. Après avoir convoqué Jean-Christophe Thiéry il y a une semaine et s’être déclaré «vivement préoccupé quant à la pérennité de la chaîne», le régulateur a commencé à examiner une vingtaine de signalements de téléspectateurs et de salariés de la chaîne. La grève ne devrait cependant pas remettre en cause l’organisation du 2ème débat de la primaire de droite, prévue le 3 novembre sur iTELE et BFMTV. Les salariés se sont engagés mercredi à organiser le débat, «quelle que soit l’évolution du conflit». «L’ambiance est morbide et tendue. Depuis le début de la grève, on est au point mort», a confié un journaliste. Après avoir déménagé brutalement des bureaux d’iTELE pour faire place à la rédaction de Direct Matin (également propriété de Bolloré), la direction a désactivé mercredi les badges des pigistes, selon des journalistes, mais ils ont été rapidement réactivés après la protestation de représentants syndicaux. Plusieurs figures de la chaîne ont annoncé ces derniers jours leur départ, du rédacteur en chef Alexandre Ifi au chroniqueur spécialiste des questions internationales, Olivier Ravanello.