iTELE paralysée par la grève : intervention du CSA

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CSA

Le conflit s’est enlisé mercredi à iTELE après l’échec d’une rencontre avec la direction qui a crispé davantage les journalistes en grève, mobilisés contre Jean-Marc Morandini et inquiets sur l’avenir de la chaîne. Mercredi soir, le CSA a annoncé qu’il auditionnerait jeudi, en assemblée plénière, le président du directoire de Canal+, Jean-Christophe Thiéry, pour lui demander des explications «sur la situation à iTELE, cette grève préoccupante, la programmation à partir de lundi et le malaise dans la chaîne», a indiqué Sylvie Pierre-Brossolette, membre du CSA. «Le CSA doit se préoccuper d’une chaîne en difficulté, pas d’une émission ou d’un animateur en particulier. Les problèmes commencent à être inquiétants, il est donc important de faire le point avec les dirigeants sur la future programmation», a-t-elle souligné. La rédaction d’iTELE a reconduit sa grève pour un 3e jour, à 86% des voix, déçue par l’absence de propositions concrètes du DG de Canal+ Maxime Saada sur les projets éditoriaux. Entre détermination et abattement, la rédaction réclame «un projet clair» et «une charte éthique», à 4 jours du changement de nom d’iTELE en CNews. Les revendications dépassent désormais largement la demande de suspension de Jean-Marc Morandini, à l’antenne depuis lundi malgré sa mise en examen pour «corruption de mineurs aggravée». Beaucoup prêtent au patron de Canal+, Vincent Bolloré, qui a imposé l’arrivée de Jean-Marc Morandini en dépit de l’opposition de la rédaction, l’intention de transformer leur chaîne d’info en chaîne de divertissement, et de pousser les récalcitrants à partir. La convention de la chaîne avec le CSA stipule qu’iTELE doit «aborder toutes les thématiques, mais ne précise pas dans quelles proportions», a rappelé le CSA. Un rassemblement de plus d’une centaine de journalistes a été organisé mercredi devant le siège de la chaîne à Boulogne. Dans la matinée, M. Saada a évoqué devant les journalistes des projets d’évolution de la chaîne, sans détailler de grille. Son objectif est qu’iTELE s’appuie sur les points forts du groupe Canal, sa maison mère, pour renforcer les thèmes du sport, du cinéma, de la culture et de l’international, tout en restant une chaîne d’info généraliste, selon son porte-parole. Un projet que les journalistes ont jugé très flou. Pas question en tout cas de céder sur Morandini. Maxime Saada a seulement annoncé un changement d’horaire de l’émission «Morandini Live», qui passera dès lundi à 09h00 au lieu de 18h00. «Il n’y aucun problème avec le contenu de l’émission», a-t-il dit, selon des journalistes présents. Pourtant, des annonceurs fuient le programme: lors de l’émission de mardi, qui a rassemblé moins de 60.000 spectateurs, presque moitié moins que lundi, un spot des jus «Innocent» a été diffusé à la surprise du groupe, qui a demandé à la régie d’éviter désormais cette case. Plusieurs autres annonceurs, épinglés par l’association Protection Enfance, ont fait de même, dont Banque Populaire et Axa, a révélé «Le Figaro», une information confirmée par la régie Havas Media.

Sur les nouveautés à venir, la direction a évoqué une émission de sport le week-end coproduite avec la filiale de Canal+, Infosport+. Le directeur de la chaîne, Serge Nedjar, qui va devenir aussi directeur de la rédaction, a cité comme «nouvelles pistes» l’arrivée du polémiste Eric Zemmour et des frères Bogdanov. Certains membres de la rédaction songent à partir, d’autant qu’ils craignent que Vincent Bolloré ne veuille les remplacer par ceux de son quotidien Direct Matin, qui emménagent dans leurs locaux. Une crainte alimentée par le dépôt par la société mère de Direct Matin de la marque «C News Matin». Maxime Saada a démenti toute volonté de fusionner les rédactions, évoquant des «partenariats». La direction a aussi prolongé jusqu’au 4 novembre la possibilité de partir dans le cadre de la «clause de conscience» (avec indemnités) pour ceux qui refuseraient de travailler avec Jean-Marc Morandini.