iTELE : les salariés ont reconduit leur grève

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Déterminés, les salariés d’iTELE ont reconduit leur grève mardi pour un 9e jour consécutif, soutenus par de nombreuses rédactions et des personnalités, mais espéraient un déblocage lors d’une nouvelle réunion avec leur direction mercredi matin. Ils ont à nouveau voté pour la poursuite de la grève mardi matin jusqu’à mercredi 11H30, à 83,6% des voix (107 sur 128), avant une réunion prévue mercredi matin notamment avec le n°2 de Vivendi, Stéphane Roussel, un proche du patron du groupe Vincent Bolloré. 

Le conflit a été déclenché il y a une semaine par l’arrivée à l’antenne de l’animateur Jean-Marc Morandini, mis en examen pour «corruption de mineur aggravée» notamment pour des castings douteux liés au tournage d’un film érotique. Malgré l’opposition de la rédaction, son émission quotidienne «Morandini Live», consacrée aux médias, a été imposée par Vincent Bolloré et maintenue toute la semaine dernière en dépit de la grève. La direction l’a suspendue lundi mais a promis son rétablissement dès la fin de la grève, une déclaration qui a accru la colère des salariés, dont certains estimaient mardi que Vincent Bolloré faisait du maintien de Jean-Marc Morandini «une affaire personnelle». 

Pour les grévistes, le conflit porte sur la question beaucoup plus large de l’indépendance de la rédaction par rapport aux actionnaires, en particulier Vincent Bolloré, et à la demande de moyens accrus pour la chaîne, affaiblie depuis cet été par un plan d’économies drastiques et des réductions d’effectifs. «Ce que nous craignons est que cette rédaction soit moins indépendante qu’avant», a résumé Antoine Genton, président de la SDJ. Les syndicats de Canal+ et la SDJ avaient organisé un nouveau rassemblement mardi devant iTELE, qui a réuni environ 300 personnes : des salariés d’iTELE mais aussi de leur maison mère Canal+ et d’autres médias qui les soutiennent, ainsi que quelques personnalités dont Roselyne Bachelot et les humoristes Eric et Quentin, anciens du «Petit Journal» de Canal+. 

Sur RMC, Nathalie Kosciusko-Morizet, candidate à la primaire de la droite, a également apporté son soutien au mouvement mardi, au nom de l’indépendance des rédactions. A la question «soutenez vous les grévistes», elle a répondu «absolument, et je me fiche complètement de me fâcher avec Monsieur Bolloré». Une réponse à l’affirmation de Benoît Hamon qui a reproché aux politiques de rester silencieux de peur de déplaire à l’homme d’affaires. «J’ai peur d’une évolution qui consiste à remettre en cause de manière plus ou moins insidieuse l’indépendance des journalistes», a poursuivi Nathalie Kosciusko-Morizet. «Il y a un certain nombre d’inquiétudes. J’ai été choquée d’entendre qu’on avait vidé les bureaux des journalistes pendant le week-end. C’est une forme de pression». Roselyne Bachelot, ex-chroniqueuse sur iTELE, a exprimé sa «stupéfaction et indignation», dénoncé «un problème de management», et estimé que la direction devait «écouter la rédaction» et «éloigner M. Morandini de ses fonctions d’animateur». 

Outre le départ de Jean-Marc Morandini, nuisible, selon eux, à l’image de leur chaîne, les salariés demandent une charte éthique pour garantir leur indépendance et des moyens de relancer leur chaîne. La tension est encore montée d’un cran ce week-end, lors du déménagement brutal des bureaux d’iTELE pour faire place à la rédaction de «Direct Matin» (propriété de Bolloré), où des affaires personnelles des journalistes ont été mises dans une benne à ordures.