Mediapart : Carine Fouteau remplace Edwy Plenel

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Mediapart, 2ème génération: l’emblématique cofondateur du site d’investigation, Edwy Plenel, en a quitté jeudi la présidence, désormais assurée par la journaliste Carine Fouteau, à la tête d’un quatuor de direction 100% féminin. «Je mesure la responsabilité qui est la mienne de prendre la suite d’Edwy Plenel», a assuré Mme Fouteau lors de la traditionnelle conférence de presse annuelle de Mediapart, qui fête ses 16 ans. La journaliste de 49 ans devient présidente et directrice de la publication du site d’investigation à la place de son cofondateur, 71 ans, qui continuera toutefois à y écrire. «C’est l’achèvement du passage de témoin en bon ordre, sereinement, des cofondateurs à l’équipe», a déclaré M. Plenel, en rappelant que son remplacement était préparé depuis deux ans en vertu d’un «processus collectif». Directeur de la rédaction du «Monde» de 1996 à 2004 et emblème du journalisme d’investigation en France, Edwy Plenel a cofondé Mediapart en 2008 avec François Bonnet, Laurent Mauduit et Marie-Hélène Smiejan. Il était le dernier des cofondateurs encore présent dans l’équipe de direction. Depuis la naissance du site, c’est lui qui l’a incarné aux yeux du grand public: «Mediapart (…) a eu besoin d’une figure tutélaire comme celle d’Edwy pour s’imposer dans le paysage médiatique», a souligné Carine Fouteau. «Pendant longtemps, Mediapart a été assimilé à cette image, à ce visage. Aujourd’hui, Mediapart, c’est une équipe», a-t-elle ajouté.  Les 4 principaux postes de direction sont désormais occupés par des femmes: Mme Fouteau, Cécile Sourd (directrice générale depuis 2023), Lenaïg Bredoux et Valentine Oberti (codirectrices éditoriales depuis 2023). «C’est venu logiquement car ce que nous faisons nous transforme», a commenté M. Plenel, en rappelant que Mediapart avait été en pointe dans le traitement du mouvement féministe #MeToo. En 16 ans, le site marqué à gauche s’est imposé «comme un contre-pouvoir» grâce à ses enquêtes sur des scandales politiques, les violences policières ou les violences sexuelles, a rappelé Mme Fouteau. «Notre projet est de faire de Mediapart un grand journal populaire, qui à la fois dérange et rassemble, par la force et la qualité de ses informations», a-t-elle poursuivi. Pour «s’adresser à un public aussi large que possible, populaire et plus jeune», la nouvelle patronne de Mediapart souhaite insister sur «les nouveaux formats», à l’image des émissions «A l’air libre» en vidéo ou «Abonnez-vous» sur la plateforme Twitch. Son élection comme présidente, à l’unanimité des neuf membres du conseil d’administration, avait «la force de l’évidence», selon son prédécesseur. Elle travaille à Mediapart depuis sa création, après avoir quitté le quotidien Les Echos à la suite de son rachat par le groupe de luxe LVMH. Avant de prendre la tête du site d’investigation, elle y a couvert les questions migratoires et en a été codirectrice éditoriale de 2018 à 2023. Comme tous les ans, Mediapart (137 salariés, dont 65 journalistes) a publié ses chiffres de l’année écoulée. En 2023, il comptait près de 220.000 abonnés (210.500 en 2022), avec un chiffre d’affaires de 22,45 millions d’euros (21,23 en 2022) et un bénéfice net de près de 2,3 millions d’euros (2,6 en 2022). Ses responsables ont souligné que le fait de dépendre quasi uniquement des abonnements et d’avoir un capital sanctuarisé depuis 2019 était une garantie d’»indépendance». «Mediapart défend un journalisme d’intérêt public au service de l’intérêt général», a martelé M. Plenel, avant un ultime coup de griffe aux «médias du groupe Bolloré» (CNews, Europe 1, JDD etc.) qui, a-t-il affirmé, «détruisent notre métier et font du mal à la démocratie».