Vincent GISBERT (SPECT) : «Les programmes de flux ne doivent pas être considérés comme une variable d’ajustement»

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Vincent GISBERT, Délégué général du SPECT

Fondé en septembre 2004, le SPECT (Syndicat des Producteurs et Créateurs d’Emissions de Télévision) regroupe la plupart des producteurs et créateurs indépendants de programmes de flux. Ces dernières semaines, le SPECT s’est réjoui de la signature du «Premier accord sur la transparence  des  comptes  et des remontées de recettes en matière de production audiovisuelle» entre tous les syndicats représentatifs de producteurs et de distributeurs et l’ensemble des éditeurs de services publics et privés. Entretien avec Vincent GISBERT, Délégué général du SPECT.

 

média+ : En quoi le  SPECT se  réjouit-il de la signature du «Premier accord sur la transparence  des comptes et des remontées de recettes en matière de production audiovisuelle» ? 

 

Vincent GISBERT : Cet accord va permettre d’harmoniser les pratiques contractuelles entre les différents acteurs de la filière audiovisuelle. L’ensemble des éditeurs, des distributeurs et des syndicats de producteurs a été signataire. Il s’agit d’un signe extrêmement positif sur la capacité de la filière à trouver des accords «gagnant-gagnant» qui sont la preuve d’une maturité. L’aboutissement de la signature a été rendu possible grâce à l’engagement de la DGMiC et du CNC. Si nous avons fait partie prenante des discussions, c’est parce qu’il existe chez nos membres, des producteurs «dits de flux», une diversité de plus en plus importante de leurs productions. 25 à 30% de leur production est consacrée aujourd’hui à des œuvres patrimoniales. La diversification se déploie dans tous les genres : documentaires, fictions et spectacles vivants. C’est une évolution importante qu’il est importante d’avoir en tête.

 

média+ : Au cœur d’un PAF en forte mutation, comment se porte le SPECT ?

 

Vincent GISBERT : Le SPECT recense 45 adhérents. Ces derniers emploient chaque année près de 50.000 personnes, ce qui en fait les premiers producteurs du secteur. Le chiffre d’affaires de nos producteurs est de l’ordre du milliard d’euros. Les derniers membres à nous avoir rejoints sont Link Production et Ligne de Front.

 

média+ : Quels sont les plans de bataille du SPECT en 2016 pour défendre la production indépendante ?

 

Vincent GISBERT : Dans le prochain Contrat d’objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions, il est très important que des indicateurs consacrés à la mise à l’antenne de formats originaux soient intégrés. C’est un point déterminant. A partir du moment où vous développez des formats en France, vous êtes en mesure de les exporter à l’international. Pour que des succès voient le jour à l’étranger en matière de formats de flux, il faut qu’ils aient d’abord une exposition sur leur marché national. C’est une condition sine qua non. Autre sujet, celui des mandats de commercialisation dans le cadre des négociations interprofessionnelles. Enfin, nous tenons à souligner le risque qui existe dans le projet de loi au Sénat. Ce dernier vise à abaisser les seuils de la production indépendante à 60% et rendre possible la prise de participation des diffuseurs dans les sociétés de production jusqu’à 49%. Cela nous semble une voie très dangereuse pour la pérennité des équilibres et de la production indépendante.

 

média+ : Vivendi est entré au capital de Banijay Group, gros producteur de flux. Quel regard portez-vous là-dessus ?

 

Vincent GISBERT : Qu’il y ait des concentrations importantes dans notre secteur est une évidence depuis deux ans maintenant. En revanche, il convient de rappeler avec force que la créativité et les formats originaux sont quasiment tous initiés et produits par des producteurs indépendants.

 

média+ : Suite au rachat de Newen par TF1, Delphine Ernotte a rappelé son attachement aux producteurs indépendants. Qu’attendez-vous du service public ?

 

Vincent GISBERT : Nous nous en félicitons mais attendons de la part de France Télévisions, une politique innovante en matière de programmes de flux avec un vrai partenariat scellé avec la production indépendante. Face aux déséquilibres budgétaires de France Télévisions, il n’est pas acceptable que les programmes de flux soient considérés comme une variable d’ajustement. Nous sommes très vigilants.  Nous militons aussi pour un élargissement de la redevance à tous les nouveaux supports.

 

média+ : Quid du placement de produits dans les programmes de flux ?

 

Vincent GISBERT : Il s’agit d’un sujet qui doit être réexaminé. Cette pratique est autorisée dans les fictions depuis plusieurs années et ces programmes ne se sont pas pour autant devenus des vitrines publicitaires. Il y a un vrai sujet lié à l’amélioration du financement des programmes et cela nous semble important de rouvrir le dossier. Pour les producteurs, il s’agit d’un potentiel relai de croissance financier. Il est évident qu’il va falloir une approche raisonnée. Il ne s’agit pas de transformer les participants aux émissions de télévision en «hommes sandwichs». La démarche est de trouver, sous les auspices du CSA, des modèles gagnant/gagnant qui permettent de mieux financer les programmes.

 

média+ : Que prévoyez-vous lors des 4èmes rencontres professionnelles des programmes de flux ?

 

Vincent GISBERT : Ces rencontres organisées par le SPECT se tiendront au mois de mai. L’idée est de leur donner une dimension encore plus large que les années précédentes à ces rencontres en intégrant tous les acteurs de la filière. Nous réfléchissons à la mise en place de partenariats et nous intégrerons aux rencontres «La Fabrique des formats», projet porté par Philippe Chazal.