«Nous vendons chaque année près de 65.000 heures de programmes français.»

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Mathieu BEJOT, Délégué général de TV France International

Depuis sa création, TV France International (TVFI) a pour mission de promouvoir l’offre de programmes français sur le marché international. L’entreprise permet aussi de faciliter les coproductions, d’informer ses adhérents, et de fédérer leurs actions.Pour nous parler des actions de TVFI à l’étranger dans le domaine de l’export des programmes français, média+ s’est entretenu avec Mathieu BEJOT, Délégué général de TV France International.

 

MEDIA +

En 2014, les ventes de programmes (fictions, documentaires, films d’animation, jeux) ont atteint 153,8 M€, soit une augmentation de 12,1% par rapport à 2013. Quelles perspectives  pour 2015 ?

MATHIEU BEJOT

Le marché reste compliqué, toujours plus fragmenté et les tarifs d’achat des grands diffuseurs ne sont clairement pas orientés à la hausse. A côté de ça, lorsqu’on examine les productions qui sont sorties en 2015, nous pouvons être plutôt optimistes sur l’évolution. La fiction a opéré la plus forte progression à l’exportation pour la 4ème année consécutive (+49,3% sur 1 an). L’animation reste le genre le plus exporté (29,2% du total des ventes). Nous avons vu, dans les années passées, un resserrement des 3 principales catégories (documentaire, animation et fiction) en matière de ventes. Nous vendons chaque année près de 65.000 heures de programmes français.

MEDIA +

Quels éléments peuvent bloquer la vente de programmes ?

MATHIEU BEJOT

La profusion de choix ! La concurrence mondiale est féroce et la production est de qualité dans de nombreux pays. Contrairement à il y a 15 ans, la géographie des échanges s’est développée et diversifiée. L’exportation devient un enjeu pour de nombreux territoires. De plus, certains diffuseurs ne sont pas prêts à mettre le prix qu’il faut pour acquérir un programme. C’est pourquoi nous avons beaucoup de «petits acheteurs» qui renforcent le phénomène des «petites ventes». Autre élément pouvant ralentir les ventes : la complexité de plus en plus forte de la gestion des droits, notamment par rapport aux fenêtres de VOD et de SVOD.

MEDIA +

Comment l’approche de TV France International évolue-t-elle ?

MATHIEU BEJOT

Nos adhérents savent qu’un bon programme ne va pas forcément se vendre. C’est pourquoi nous faisons un effort de marketing assez soutenu. Nous nous sommes beaucoup investis par exemple sur l’opération des «Emmy Awards» pour promouvoir sur place les programmes français en lice.

MEDIA +

Qui sont les plus gros consommateurs de programmes audiovisuels français ?

MATHIEU BEJOT

Les pays européens sont très demandeurs de programmes français. C’est le cas de l’Allemagne, de l’Italie et de la Belgique qui sont les plus gros acheteurs. Ce n’est pas une grande surprise puisque ce sont aussi des territoires où les tarifs d’achats sont les plus élevés. Nous sommes aussi présents depuis 15-20 ans sur le marché asiatique qui représente 10 à 15% des ventes françaises.

MEDIA +

Les Etats-Unis assouplissent-ils leur vision du marché français ?

MATHIEU BEJOT

Outre-Atlantique, vous avez des marchés avec des plateformes de SVOD et des chaînes de niches qui se mettent en place. Historiquement, nous vendons aux Etats-Unis de la fiction et des documentaires. Mais il y a eu ces dernières années des productions françaises tournées en Anglais comme «Taxi Brooklyn» ou «Crossing Lines», qui ont été diffusées sur des chaînes US.

MEDIA +

Les plateformes de VOD et SVOD sont-elles un nouveau relai pour l’export français ? 

MATHIEU BEJOT

Oui, clairement. Cela nous permet de toucher des marchés plus hermétiques à la production non locale ou non américaine. Des plateformes de type Netflix, Hulu ou Amazon sont des débouchées pour les productions françaises.

MEDIA +

Les ventes de programmes français d’animation à l’étranger diminuent après 5 années de hausse consécutives à 45 M€. Le marché arrive-t-il à saturation ?

MATHIEU BEJOT

Non, je ne pense pas. Après une année 2013 exceptionnelle en matière d’exportation d’animation, la production française dans ce genre en 2014 a connu une baisse de 10 à 15%. Et de manière tout-à-fait normale, moins vous produisez, moins vous avez de contenus à exporter. Cela fonctionne par cycle de 3 ans.

MEDIA +

Dans le cadre de la 22ème édition du «Prix du Producteur Français de Télévision», le Prix Export sera décerné lundi 14 décembre à Paris. Pouvez-vous nous en parler?

MATHIEU BEJOT

Il s’agit d’un prix symbolique qui a toute son importance. C’est un moyen de mettre l’accent à la fois sur l’exportation, les programmes français qui fonctionnent à l’étranger, et le métier de distributeur. Nous avons parfois tendance à considérer qu’un programme se vend parce qu’il est bon, en oubliant qu’il y a derrière un exportateur qui se déplace sur les marchés, que nous faisons du marketing et que nous essayons de convaincre les acheteurs. Dans cette lignée, début 2016, TVFI proposera un nouveau site de visionnages des programmes français. Nous y introduirons un certain nombre de fonctionnalités pour les acheteurs avec des partages de playlists par exemple. L’idée est d’avoir un outil beaucoup plus opérationnel.