«Dans la cour», comédie dramatique avec le duo inattendu Deneuve/ Kervern

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«Dans la cour», de Pierre Salvadori, est une comédie dramatique d’où émergent une retraitée glissant lentement vers la folie et un rocker dépressif devenu concierge d’immeuble, porté par un duo aussi inattendu que solide, Catherine Deneuve et Gustave Kervern. 

Entre ces 2 personnages cabossés, une étrange relation d’amitié va naître et la cour devenir un microcosme «un peu déglingué», selon l’expression du cinéaste, peuplé aussi de personnages hauts en couleur à la «limite du burlesque». 

Antoine a la quarantaine. Après avoir tourné le dos à la musique, le voilà qui, un jour, atterrit comme concierge dans un vieil immeuble parisien, tel un animal blessé qui se réfugierait dans son terrier. Mathilde est une jeune retraitée à l’agenda bien rempli entre la vie de la copropriété et d’autres activités associatives jusqu’au jour où elle remarque des fissures dans son salon. Les fissures vont devenir une obsession: et si l’immeuble s’effrondrait? Pierre Salvadori, auteur de nombreuses comédies comme «Hors de prix», en 2006, et «De vrais mensonges», en 2010, retrouve un ton plus grave rappelant celui des «apprentis», en 1995, avec François Cluzet et Guillaume Depardieu. «Dans tous mes films, même les comédies, il y a une tendance à glisser vers quelque chose d’un peu mélancolique», confie le réalisateur. «Dans «Les apprentis», c’était des personnages jeunes, en devenir, alors que là ils sont plus ou moins dans l’après: Deneuve est après la retraite avec ses interrogations, le temps à combler. Une chose est sûre, le réalisateur avait envie de «revenir vers des histoires un peu plus ancrées dans le réel», de raconter «plus frontalement» des choses intimes. 

Le thème de la dépression n’est pas dû au hasard. Pierre Salvadori avoue en avoir souffert jeune «entre 22 et 24 ans». C’était «deux années terrifiantes», deux années d’une douleur «incompréhensible». «On ne sait jamais si la dépression va s’arrêter ou si on va être collé au plafond toute sa vie». Le film parle aussi du sentiment de honte que les dépressifs peuvent éprouver ou encore de «la peur, de l’inquiétude permanente» qui sévit plus généralement dans notre société à l’heure de l’information continue. «Je voulais parler de comment on vit avec la peur, combien elle paralyse», poursuit-il. «Chaque personnage incarne une forme de réaction à cette inquiétude sociétale». Il y a ceux qui prennent des substances illicites comme Antoine, ou ceux comme M. Maillard (Nicolas Bouchaud) qui a toujours peur que quelqu’un pénètre dans l’immeuble, jusqu’à l’absurde. 

«Dans la cour» a été réalisé avec un budget deux fois moindre que pour le précédent (environ 4,5/4,8 millions d’euros contre 10/11 millions); «pour m’enlever la pression, faire le film que je veux et m’autoriser la fin que je veux», même si, dit-il, il a «toujours fait» les films qu’il voulait. Reste que ce long métrage a pris plus de temps à voir le jour que les autres tant l’auteur a passé des mois sur le montage pour «préserver le rythme» et chasser «l’ennui, mon ennemi».