Alors que Roland-Garros 2025 bat son plein sur les antennes et plateformes de France Télévisions, Laurent-Éric Le Lay, directeur des sports du groupe, dévoile les coulisses d’un dispositif toujours plus ambitieux. Chaîne numérique, innovations technologiques, renforcement éditorial, nouveaux consultants, stratégie sur les droits sportifs… Il revient sur les enjeux d’un service public en pleine transformation, entre puissance linéaire et accélération digitale.
Il se passe beaucoup de choses chaque année à Roland-Garros, notamment côté technologie. Le lancement de la chaîne numérique france.tv Roland-Garros semble s’inscrire dans l’héritage de Paris 2024. Est-ce une première brique vers une offre sportive digitale plus large ?
C’est peut-être un peu prématuré de dire ça. Ce qui est certain, c’est que les J.O. nous ont permis de lancer une première chaîne numérique consacrée à un événement. On a voulu prolonger cette dynamique avec Roland-Garros, car ce que nous avions mis en place a très bien fonctionné : diversité des incarnations, autre tonalité éditoriale, et surtout une interactivité qui permet un vrai dialogue avec les publics. Roland-Garros était une excellente occasion pour réitérer ce dispositif, notamment dès la première semaine avec les qualifications, qui sont désormais perçues comme faisant partie intégrante du tournoi.
Roland-Garros est aussi devenu un véritable laboratoire technologique. Quelle place accordez-vous à des initiatives comme le RG Lab dans votre stratégie d’innovation ?
Le RG Lab, c’est ce que j’appelle notre «recherche fondamentale». On y teste des technologies encore émergentes, parfois même en amont de leur démocratisation. Par exemple, on a expérimenté très tôt la 5G, l’an dernier on travaillait sur l’Apple Vision Pro — un produit pas encore généralisé. Cette année, on explore l’intelligence artificielle, la réalité augmentée, la 3D sans lunettes… C’est un espace d’expérimentation très avancé. Certaines technologies intégreront peut-être nos antennes, d’autres non, mais tout cela nous permet de rester en veille active. Roland-Garros, c’est un terrain de jeu idéal : c’est médiatique, vivant, compréhensible, et surtout en direct. On peut y tester des innovations en conditions réelles.
Au-delà de ces expérimentations, en quoi le dispositif 2025 marque-t-il une nouvelle étape dans votre manière de raconter le sport ?
Ça évolue chaque année. La création de cette chaîne numérique constitue une vraie avancée. Cela fait longtemps que nous diffusons en digital ce que l’on appelle le «multicourts», mais ici, on est allé plus loin : on a éditorialisé cette diffusion avec des commentateurs spécifiques, des consultants dédiés, un ton distinct. Ce n’est plus une simple retransmission alternative : c’est une véritable seconde expérience proposée aux téléspectateurs. On ne parle pas encore d’une chaîne de sport numérique à l’année, mais être présent sur le digital est devenu essentiel pour nous. Et surtout, il faut le faire avec les codes du digital, pas en copiant simplement le linéaire.
Vous cherchez donc à conjuguer télé, interactivité, réseaux sociaux et plateforme numérique ?
Exactement. Les réseaux sociaux sont devenus essentiels. On y propose des contenus plus courts, plus saillants : des extraits, des images fortes, parfois animées. C’est une façon d’atteindre un public qui passe beaucoup de temps sur ces plateformes et de lui donner envie de suivre ensuite les événements en direct, sur nos chaînes ou en streaming.
En matière de droits sportifs, comment situez-vous France tv aujourd’hui dans un contexte toujours très concurrentiel ?
Il y a toujours une forte concurrence sur les droits. Le sport reste un levier très attractif pour toutes les chaînes, car il attire des audiences puissantes, notamment les jeunes. Cela dit, le marché français est moins en croissance. On voit bien que les prix sont plus encadrés. C’est pourquoi, au-delà de la dimension financière, on mise beaucoup sur la valeur éditoriale et sur la puissance d’exposition de nos antennes. Être diffusé massivement en clair, c’est un vrai atout pour les ayants droit.
Comment France Télévisions parvient-elle à rester un acteur central du sport en clair, malgré un contexte budgétaire contraint ?
On travaille énormément l’éditorial. Ce n’est pas qu’une question de moyens. On valorise au maximum les événements que nous avons en les exposant très largement, en mobilisant tous nos canaux : France 2, France 3, France 4, france.tv, les réseaux sociaux. Et bien sûr, on reste offensifs sur le plan des offres financières quand c’est possible.
Vous avez récemment renouvelé vos droits sur les Coupes d’Europe de rugby. Le rugby reste-t-il une priorité stratégique pour vous ?
Oui, clairement. Nous venons de sécuriser un nouveau partenariat pour les quatre prochaines saisons sur les Coupes d’Europe. On diffuse trois matchs par journée, les finales sur France 2 et France 3… L’exposition est très forte. Nous avons même produit un documentaire sur les 30 ans des Coupes d’Europe. C’est une manière de valoriser la discipline et d’enrichir l’expérience des téléspectateurs. Et plus largement, je crois à la vertu des partenariats dans la durée. C’est ce qui crée la confiance.
Et les Six Nations, un autre pilier du rugby sur France Télévisions ?
L’appel d’offres va être lancé dans les prochains jours. Bien sûr, nous aimerions continuer. Nous avons toujours diffusé le Tournoi, y compris dans les périodes plus difficiles de l’équipe de France. Aujourd’hui, les audiences sont excellentes, l’équipe est populaire… Mais notre engagement n’a jamais varié. La fidélité, c’est une valeur forte du service public.